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Citation de JulienDjeuks


Réalisant que les seules personnes ne partageant pas ma condition de gosse de riche auxquelles j’avais jusqu’ici adressé la parole étaient des subalternes : domestiques, chauffeurs, salariés d’une des entreprises familiales. « Ti chéri. » La distance cachée sous la condescendance. Les registres de la langue du chef. C’était la première fois que je parlais à des personnes d’un milieu différent du mien sans être en position de chef. La première fois que je faisais face à une situation qui commandait de réapprendre à parler. La première fois que je m’inquiétais de l’effet de mes propos sur leur destinataire. Il fallait trouver un ton juste. D’instinct, je me disais qu’il ne fallait pas parler comme ma mère quand elle s’adressait à une vendeuse de magasin ou à une apprentie esthéticienne. Ma mère est indifférente à ces choses, mais j’ai souvent perçu la violence muette cachée sous les formules d’obéissance. Oui, madame. Très bien, madame. Vous êtes une chieuse, madame. Cette première visite au pays du Capitaine, c’était beaucoup de premières fois. La première fois que je m’engageais dans cette partie de la ville. La première fois que je prêtais attention à cet étrange paysage urbain que je traversais au ralenti. L’état des maisons, les toits de vieilles villas qu’on avait rafistolés avec du bois sale et des tôles usagées, l’élégant tracé des fenêtres corrompu par des rideaux de tissus colorés de mauvaise qualité témoignaient de la succession ici de choses très différentes. Le sujet de mon papier, c’était cette différence. (p. 28)
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