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Critiques de Malika Latrèche (2)
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Les filles voilées parlent

Un livre qui ne paie pas de mine mais qui devrait être lu par tous.

Surtout les gens qui ne comprennent pas les femmes qui "osent" porter un voile en France, ceux qui défendent leurs opinion avec des "la femme s'est battue pour être libre, c'est une honte" ... Ce livre est facile à lire, il suffit de l'ouvrir, se lancer, et ca nous fait un bon rappel je trouve, sur la notion de liberté justement.

On n'est pas obligé de tous vivre de la même manière pour être libre. Par contre on se doit de laisser les autres vivre leur vie si on est réellement pour la Liberté.

Bref, je le conseille vivement à tous, musulmans, non musulmans, croyants en quelque chose ou pas.

Avant de critiquer quelqu'un, faut le connaitre, et ce livre nous aide à connaitre ce que représente réellement ce voile, et ce sont des femmes concernées qui ont la parole, pour une fois.
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Les filles voilées parlent

Cet ouvrage a été motivé par la volonté de remédier à la circonstance que le débat (Commission Stasi) ayant conduit à l'adoption de la loi de mars 2004 « sur la laïcité à l'école », au demeurant prolixe sur les motivations imputées aux filles et femmes voilées et abondamment médiatisé, leur a entièrement nié le droit de s'exprimer.

À l'issue des entretiens non-directifs avec 44 femmes et adolescentes musulmanes voilées de France, en dépit de la diversité des personnalités, de leurs âge, origines, milieu familial, parcours d'études, ambitions ou réalisations professionnelles, militantisme associatif pour la plupart, certaines conclusions totalement opposées à la vulgate entourant la loi « anti-voile » peuvent être énoncées, avec pour force persuasive leur oppressante invariance :



- Dans la France des années 2000, fort rares sont les femmes qui sont contraintes à porter le voile. Ce choix est au contraire très généralement réprouvé par l'entourage familial, principalement à cause de l'anticipation des difficultés de vie dues aux discriminations qu'il entraîne. Mais quand bien même le voile fût imposé, sa proscription par la loi consiste exactement dans la même forme de violence que le port forcé, à savoir l'imposition, qui est contradictoire avec la liberté de choix.



- Il est hypocrite ou carrément mensonger de considérer la loi de 2004 comme une filiation des lois Ferry-Goblet (1880-1886) sur la laïcité de l'école. La laïcité fin XIXe-début XXe, outre qu'elle avait pour postulat l'obligation de l’État d'assurer la liberté de pratiquer tous les cultes (et celle de non-pratiquer), imposait la neutralité des agents du service public d'éducation, et non celle des élèves, encore moins celle des parents d'élèves. La perception unanime des interviewées, qui par ailleurs ont toutes manifesté de l'attachement pour les trois piliers de la République ainsi que pour le principe de laïcité, est que ce dernier a été violé par une mesure lésant à la fois l'égalité et la liberté du culte, doublée d'une discrimination à caractère sexiste.



- L'entrée en vigueur de la loi de 2004 a entraîné une vague d'intolérance « anti-voile » dans des sphères bien plus vastes que l'école, avec une propagation par cercles concentriques contre laquelle même les interventions législatives ou judiciaires successives n'ont pas été efficaces ; d'abord par l'exclusion des mères voilées en tant qu'accompagnatrices des sorties scolaires (en dépit de la condamnation de la HALDE et des préconisations du ministre Xavier Darcos) ainsi que leur ostracisme des instances représentatives des parents d'élèves ; ensuite au sein des universités et des grandes écoles ; puis très généralement dans les institutions publiques d'insertion professionnelle (ANPE et ses sous-traitants), comme si la discrimination à l'embauche liée au faciès n'était pas déjà un fléau contre lequel il fallait lutter ; enfin jusque dans le milieu associatif, notamment féministe, ce qui représente une contradiction évidente avec les valeurs que celui-ci revendique par ailleurs...



- Pour leur très grande fréquence, les agressions verbales et parfois physiques dans les rues et les commerces contre les femmes voilées relèvent du comportement « à valeur performative : à force de le dire, cela se produit ». L'injure la plus fréquente, avec « Rentre chez toi ! », qui a effectivement pour effet de produire chez ses victimes le fantasme d'une vie meilleure... en Angleterre, Belgique ou en Suisse, est apparemment : « Retourne dans ta cuisine ! ». Il est évident que l'exclusion scolaire, universitaire, professionnelle, chez des femmes qui aspirent à se former, à travailler, à acquérir l'autonomie et l'indépendance, en un mot, à s'émanciper, produit l'effet de renforcer la dépendance du foyer familial ou conjugal, de s'isoler de la société et de se renfermer, voire il provoque l'enfermement communautariste (si tant est que cela soit redoutable...). Face aux injonctions contradictoires de la société majoritaire, outre la haine et la souffrance ainsi provoquées, la détermination dans le choix du port du voile s'avère donc renforcée, ne serait-ce que parce que le seul réconfort ne provient que de la foi (en particulier dans l'islam où la résignation face à l'adversité et aux épreuves envoyées par Dieu est perçue comme une vertu primordiale).



- Par effet sans doute de l'auto-sélection opérée par l'acceptation rare de prendre la parole en participant à cet ouvrage, il apparaît cependant dans ces témoignages des femmes d'une admirable pugnacité, d'une inébranlable force de résistance, émotionnelles autant qu'intellectuellement remarquables, dotées d'un certain optimisme quant aux effets de leur engagement militant, jugé capable d'améliorer la situation, ne serait-ce qu'en plusieurs générations et par opposition à la posture de génération précédente, effacée et résignée, qui a subi pour avoir très majoritairement dû affronter les difficultés de la migration, parfois celles d'une faible instruction et d'une insuffisante maîtrise de la langue. Si toutes ces femmes témoignent d'humiliations, de blessures, de « scènes traumatiques », d'une montée du racisme islamophobe (ou anti-musulman, si l'on préfère) et du sexisme, elles sont fort éloignées des clichés misérabilistes qu'on leur prête, et aussi presque unanimes à montrer que cette situation est mouvante et peut-être réversible ; sur suggestion des intervieweurs, elles terminent leur intervention par des appels à nous tous, qui peuvent être ainsi résumés, selon les mots d'excipit de l'épilogue (par les trois auteurs) :



« Il y a un choix de société à faire et à assumer. C'est à nous de dire si nous voulons vivre séparés les un-e-s des autres. C'est à nous de dire si nous acceptons qu' "au nom du peuple français" […] une loi exclue des élèves de l'école. C'est à nous de dire si nous acceptons qu'au nom du féminisme, des femmes soient insultées, violentées, humiliées ou discriminées. C'est à nous de dire si nous acceptons qu'au nom de la laïcité et du "vivre ensemble", une partie de la population soit ostracisée et sans cesse renvoyée à une "différence" prétendument "inassimilable". C'est à nous de dire si nous acceptons ces logiques d'exclusion ou si nous préférons répondre à l'invitation que constitue ce livre, et que plusieurs des auteures ont expressément formulée : "suspendez votre jugement, éteignez votre téléviseur, et ouvrons le dialogue". » (p. 329)
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