Tels les Romains de l’Antiquité, les Japonais se révèlent des urbanistes compétents hors de chez eux. Chez eux, malgré la pléthore de grands architectes et d’ingénieurs talentueux, Tôkyô telle Rome s’élabore dans la confusion des intérêts et ne possède même pas toujours, au contraire de la capitale antique, de Grand Cloaque (Cloaca Maxima) ce précurseur du tout-à-l’égout.
Le concept souvent mal compris de mitate, traduit de manière ambiguë par le terme de réplique, constitue à l'origine un des principes essentiels du travail des maîtres-jardiniers. En réalité ceux-ci recréent en miniature des paysages empruntés dans les subtiles compositions des jardins traditionnels. Le mitate est primordial et n'oppose pas l'emprunt à la création originale, mais les lie au contraire intimement. Dans ces jardins, l'emprunt est moins une copie qu'une évocation, une métaphore miniaturisée de lieux réels, célèbres de Chine ou du Japon ou encore des paysages littéraires ou mythologiques. Le flâneur lettré, va reconnaître les citations propices à sa rêverie dans cet univers où se mêle code et invention.
Appliquée à l'architecture et à la ville, la réplique s'étend dans trois directions principales parfois imbriquées: l'hybridation, le stéréotype et la schizophrénie.
Le stéréotype, cette version abâtardie et consumériste du mitate, est le mieux caractérisé par le désert inventif et prolixe des banlieues résidentielles. Au royaume stérile des maisons vendues sur catalogue par les grands constructeurs de maisons individuelles, on découvre la foire des néos : néo-classique, néo-colonial, néo-sukiya et finalement néologisme.
Le phénomène plus récent de construction d’infrastructures de transport superfétatoires et coûteuses ne déroge pas à cette logique : favoriser les entreprises et trouver d’éventuelles sources de financements occultes.