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Citation de PATissot


La dernière nuit dans le ghetto était le vestibule de la mort. L’insomnie et l’angoisse étaient les derniers compagnons des détenus. Très souvent, peu de Juifs étaient dupes, en dépit des efforts des Allemands pour ne laisser filtrer aucune information dans le ghetto. Il arrivait déjà que, quelques jours auparavant, des paysans non juifs avertissent les Juifs d’une prochaine fusillade. Ils étaient les premiers au courant, en tout état de cause : on pouvait difficilement manquer de repérer des fosses communes fraîchement creusées aux alentours, d’autant plus quand les autorités allemandes, via les starostes, avaient réquisitionné la main-d’œuvre locale pour le faire.
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À défaut de pouvoir quitter le ghetto, la nuit était consacrée à l’aménagement de la cachette, que l’on avait parfois préparée depuis des mois, comme c’était le cas de bunkers à Rogatine. On guettait le moindre bruit qui signalerait l’entrée des forces d’extermination dans le ghetto pour se précipiter dans la planque. Les moins prévoyants passèrent une nuit blanche à chercher une solution pour eux et leurs familles. Et enfin d’autres, dont les voix ne sont pas parvenues jusqu’à nous, acceptèrent leur destin et trompèrent parfois l’attente de la mort dans la prière. Après des mois et des mois de privations, de deuils successifs, de peur, de faim, de froid, de lutte pour un travail, de combat contre les épidémies, de souffrances quotidiennes sous les coups des bourreaux, la mort put être envisagée comme une délivrance.
C’était aussi l’heure des adieux. À Louninets, Susi Grunberg-Gelbardova, née en 1910, écrivit à son mari le 1er septembre 1942, soit la veille de l’anéantissement du ghetto :
« Mon mari bien-aimé ! Je suis assise peut-être pour la dernière fois dans cette chambre où nous avons été si heureux ; et je t’écris quelques mots d’adieux. J’ai le sentiment que tu es en vie et j’espère que ces lignes vont te parvenir. Les fosses sont prêtes, tôt ou tard, probablement cette nuit, l’inévitable va se produire. Je meurs à contrecœur, mais je veux mourir comme un "homme" si je ne parviens pas à m’enfuir. Je ne sais pas encore ce que je vais faire avec l’enfant. L’étau se resserre tant qu’on ne peut pas s’évader. Je ne peux pas dire que j’ai peur, même si je suis nerveuse »
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