LAISSES D'ENFANCE
3.
entre les briques et les briques
tout ce salpêtre
creusé ongles nus dans l'été immobile
les langues des vaches s'allongeaient pour atteindre les pommes
jusqu'à ce que
tout à coup la cour
devienne trop petite rétrécie pour le charroi
et le gravillon sans poids dans la main
on était si jolies et méchantes et si gaies
à compter les fraises au pied du mur à recopier les crinolines
des gravures
pendant qu'un à un s'ajoutaient les carrés de laine mêlés
aux billes de terre les carrés de laine
pour langer les morts futurs
jeux familiers
dans l'odeur des légumes cuits et des pruneaux
le lapin attendait ventre ouvert
un aboiement enfin
traversait la fraîcheur du soir)
grenier rapiécé des campagnes comment te dire
comment dire le fer repeint chaque été la craie sur
les doigts les dictionnaires
appris par cœur et l'essoreuse dans son bruit de
carlingue
et comment dire le convoi d'octobre dont les roues
ont émietté les ardoises
essaie
mais à quoi bon
(aussi l'odeur humide la nuit quand ça t'étreint)