Mark Edwards

La vie en résidence était encore pire que ce qu’elle avait imaginé. Les autres filles ne lui adressaient quasiment plus la parole. Becky avait réussi son pari de séduire Lucas, le musicien qu’elle avait bécoté lors de la première soirée, et sa voisine entendait leurs ébats passionnés pratiquement toutes les nuits, notamment parce que leur tête de lit heurtait bruyamment le mur mitoyen ; pour Sophie, les bruits en question évoquaient ceux d’un accouplement de renards sauvages. Elle atténuait ces désagréments à l’aide d’un casque acoustique, et elle n’en voulait pas particulièrement aux deux tourtereaux d’avoir une vie sexuelle aussi palpitante, mais ensuite, ils avaient pour habitude d’écouter de la musique très bruyante jusqu’à trois ou quatre heures du matin. Elle avait tenté d’en parler à sa voisine, qui lui avait ri au nez en lui conseillant de mettre un peu plus de piment dans sa propre vie. À présent, Sophie se retrouvait devant un dilemme. Devait-elle se plaindre auprès des autorités universitaires ? Elle devinait sans peine les commentaires que cela susciterait à son sujet : « C’est la fille qui est jalouse de sa voisine qui s’envoie en l’air ». Ne pouvant s’y résoudre, elle souffrait donc en silence et les cernes se creusaient autour de ses yeux.