Si je pouvais, si j’avais pu ou eu la force, j’aurais crié tout au long de ma vie. Hurler au soleil jamais assez ardent. Hurler aux membres disloqués. Impossible de vivre en criant. On retient les bourrasques, on décélère la machine, on prie pour que le cauchemar reste cauchemar nocturne. On se cache sous les ponts jaunes, on se retient aux cordes électrisantes, on veut une vraie finale démentielle. Mais. Avant tout. Je craque sous la pression. Je me sens marmite qui bout qui va se déverser, larve salissante. Même en ce moment choisi j’arrive encore à contrôler ma furie, ma haine. Tu m’as tout pris; mon enfance tout sauf joyeuse, mes objets sacrés, mes pommades quotidiennes tout sauf mes rides que tu as enfoncées, disons-le. Je suis vieille, je le sais, je radote, je n’en peux plus de vivre sous vide. Siphonnée par toi, tes humeurs, tes pièges. Je voudrais grincer comme une guitare peut le faire en entraînant le radeau au cœur du typhon. Pression intolérable quand les épaules me font trébucher, quand les vomissements s’unissent à ma diarrhée, quand je n’arrive plus à saliver tant j’ai mal d’être. Vide. J’étouffe en silence obligé. Il faut que ça saigne.
Décrire l’élan qui s’empare de tout mon être d’un coup. Bourrasque épuisante. C’est fatigant d’aimer comme j’aime. Sans limites. Sans questionnement. Dans un relâchement près de l’orgasme. Je mouille mes slips en même temps qu’il souille ses Pampers. Je retiens mon souffle quand il m’appelle de ses petits pleurs si doux. Des pleurs mélodies. Des larmes sans douleur. Un appel vite retourné. Il m’aime quand il devrait me cracher dans le dos. C’est peut-être cela ses vomissements répétés après les biberons. Ou après le sein. J’alterne. Coup d’essai. Mon lait lui remonte dans la gorge. Mon mamelon trop dur. Mon aréole tache brune énorme affolante. Mon sein le fait régurgiter. Il a le mal de mer. S.O.S. biberons tout préparés. Achat vite réglé, recette incluse, délire en extra.
J'écris surtout pour ne pas être publiée.