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Citation de Aegidius


Matthieu Dauchez
Le chromosome de l'amour

Le cardinal Luis-Antonio Tagle, archevêque de Manille, est connu pour sa simplicité et son amour des plus pauvres. Lors d’une visite à la fondation, il s’est amusé à demander à un groupe d’enfants assemblés devant lui, ce qu’ils aimeraient être quand ils seront adultes. Les plus jeunes se sont facilement prêtés au jeu et nombreux sont ceux qui se sont approchés de l’estrade pour répondre au cardinal et partager leur rêve devant les autres.

Le prélat tenait le microphone et écoutait avec attention chaque réponse. Nous ne saurions comptabiliser les garçons qui ont dit vouloir être policiers, ni les filles désirant être maîtresses d’école, bien évidemment, mais nous avons pu recenser aussi quelques soldats, médecins, infirmières… et surtout un certain nombre d’enfants a fait part de leur volonté de reprendre le flambeau des éducateurs dans la fondation afin d’aider, à leur tour, les enfants abandonnés dans les rues de Manille. La scène « tait touchante.

Mais le plus bouleversant fut le moment où la jeune Toinette, enfant trisomique de quinze ans, extirpée quelques années auparavant d’une prison de quartier, s’est approchée à son tour. Le cardinal fut aussitôt conquis par son pas assuré et son regard malin. Son handicap mental n’a jamais modéré sa témérité et la jeune fille ne semblait pas du tout intimidée de parler devant tout le monde.

L’échange fut déconcertant :

- Et toi, Toinette, alors, que veux-tu faire dans quelques années ?

Et sans hésiter, elle répondit :

- Quand je serai grande, je veux être l’amour !


C’est une jeune fille trisomique, enfant de la rue à Manille, qui résume en quelques mots le chemin le plus noble qui soit. Mystérieuse innocence. La sagesse de notre petite trisomique nous rappelle très fortement celle de la petite carmélite de Lisieux :

« La Charité me donna la clé de ma vocation. Je compris que si l’Église avait un corps, composé de différents membres, le plu nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas, je compris que l’Église avait un cœur et que ce Cœur était brûlant d’amour. Je compris que l’Amour seul faisait agir les membres de l’Église, que si l’Amour venait à s’éteindre, les Apôtres n’annonceraient plus l’Évangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang… Je compris que l’amour enfermait toutes les vocations, que l’amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les lieux… En un mot, qu’il est éternel !

Alors, dans l’excès de ma joie délirante, je me suis écriée :ô Jésus, mon Amour… ma vocation, enfin je l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’amour !... Oui j’ai trouvé ma place dans l’Église et cette place, ô mon Dieu, c’est vous qui me l’avait donnée… Dans le Cœur de l’Église, ma Mère, je serai l’AMOUR… »


Je me souviens avoir entendu le magnifique témoignage des parents d’un enfant trisomique. La maman partageait la stupeur qu’ils avaient ressentie à l’annonce du handicap, mais aussi le refus catégorique qu’ils avaient opposé à la solution facile et injuste de l’avortement. Elle avait expliqué avec humilité la peur des premiers mois, la difficulté du quotidien et la souffrance provoquée par les regards indélicats et les remarques maladroites ou volontairement cruelles d’inconnus. Puis elle avait eu ces mots si profonds :

- On m’a expliqué que le handicap de notre petit garçon était d’avoir un chromosome de trop. J’ai mis plusieurs années à comprendre qu’il s’agissait du chromosome de l’amour !

On ne répond pas au mal par une équation mais par une effusion d’amour. Les puissants de notre monde en souffrance, ne comprennent apparemment pas cette logique, mais les plus pauvres l’ont assimilée en profondeur et la mettent en pratique avec générosité.

pp. 118-121
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