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Citation de LydiaB


La trentaine passée, Emmanuel Kant s'abreuva tant dans l'un des cafés qu'il fréquentait avec habitude et modération qu'il ne put retrouver son domicile sis Magistergasse à Königsberg. Chaque soir, il jouait au billard et aux cartes, chaque midi, il prenait un verre de vin. Jamais de bière. Il était l'ennemi déclaré du breuvage national prussien, "un poison lent, mais mortel", qu'il percevait comme l'une des causes les plus importantes de mortalité et... d'hémorroïdes. Imaginer Kant amateur d'estaminet n'est pas sans étonner. Le piétiste austère, rigoureux, le philosophe ardu et exigeant n'en était pourtant pas moins un buveur et un mangeur averti, au point que son ami le conseiller secret Von Hippel lui disait souvent en plaisantant : "Vous écrirez bien encore, tôt ou tard, une critique de la cuisine ?" Hélas ! il n'y eut pas de Critique de la raison gastronomique. Là même où le penseur analyse le goût - dans sa Critique de la faculté de juger -, il ne laisse aucune place à la nourriture.

Lorsqu'il fait la théorie des sens, il détermine ceux qui sont supérieurs et objectifs - le toucher, la vue et l'ouïe - et ceux qui sont inférieurs et subjectifs - l'odorat et le goût. Le nez et le palais sont les organes des fonctions sans noblesse, car "la représentation qui se fait par eux est plus celle de la délectation que de la connaissance des objets extérieurs". Soit. Mais Kant omet d'intégrer l'imagination, la mémoire et l'entendement dans ce processus complexe qu'est la production d'une saveur et d'un jugement de goût buccal. Sans mémoire des saveurs, des mélanges sans imagination analytique et synthétique, sans saisie globale et particulière par l'entendement, il ne saurait être question de goûter. Et Kant le sait.
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