Miguel A. Seman

J e m’étais levé tard, je ne me suis pas pressé pour autant. Je me suis dirigé vers la salle de bains au fond du couloir et j’ai pris une douche glacée, pas par plaisir, mais parce que la chaudière ne fonctionnait pas non plus ce jour-là. Après m’être rasé en grelottant, j’ai enfilé mes vêtements et regagné ma chambre. J’ai pris mes papiers et, avant de sortir, j’ai jeté un dernier coup d’œil aux quatre murs et au plafond. J’ai fermé à clef et je me suis engagé dans les escaliers avec la sensation que quelque chose, j’ignorais quoi, ne tournait pas rond. Avant d’atteindre le rez-de-chaussée, je suis revenu sur mes pas. J’ai remis la clef dans la serrure et, lentement, j’ai ouvert la porte. Tout était à sa place. J’ai avancé jusqu’au lit et je me suis arrêté devant les draps défaits. À cet instant, une pensée étrange m’a traversé l’esprit. Une idée qui semblait appartenir à un autre. Si quelqu’un pouvait lire, dans les plis de nos draps, les rêves de la nuit précédente, nous serions tous condamnés. J’ai arrangé l’oreiller, j’ai fait le lit comme si j’effaçais mes empreintes et je suis ressorti. La pendule du salon marquait quatre heures pile. Le Rital m’avait demandé d’être ponctuel et j’avais déjà une demi-heure de retard.
– Ce type est bizarre : si tu traînes, il est capable de prendre la fuite, avait-il dit.

Tu sais pourquoi les gens ne rêvent plus de nos jours ? Parce qu’ils ne veulent pas se souvenir. Ils ont très peur. Tout le monde se méfie de tout le monde. Jusque de soi-même.

Un rêve c’est un point de départ, a-t-il dit, à partir de là, tu peux arriver à n’importe quelle partie de l’âme.