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Citation de Livreur


Lectrice bien-aimée, qui, pour mieux les voir, tiens ces pages dans le châssis d’une fenêtre aux vitraux colorés entre ses verges de plomb, je pense souvent à toi, dans la sombre tristesse qui est la mienne. À tes longs cils timorés penchés sur ces lettres, à ta main gauche aux lourdes bagues translucides, posée sur un genou, et à l’index de ta main droite, qui suit ces lignes. Des volutes de ses boucles, ta scintillante chevelure entoure ton sein... Tu ne cherches pas dans les feuilles des livres quelque philosophagie stérile, ni la politique hargneuse qui enchaîne les exaltés et les téméraires dans d’obscures prisons, mais l’amour éternel, qui ne meurt pas plus que les roses glissées entre les pages. Et tu as raison, belle enfant, car il n’est pas une ligne de tous les écrits du monde qui ne soit mélodrame. Nous tous, nous sommes mélodramatiques, qui grattons et fouillons sous le ricanement de la raison. Le cerveau, cet archange, tout comme la sphère d’humus sur laquelle nous vivons, ne contient qu’une mince pellicule de pensée, le reste n’est que boue, passion impétueuse, haine féroce, amour, cieux aux soleils de sang et continents d’effroi. C’est là que le triste poète porte ses pas, sa plume — en guise d’épée — à la main, tandis que le dernier crépuscule s’éteint. C’est là seulement que l’inspiration fait son nid. C’est là que moi aussi, ma maîtresse, je me nourris.
Tu es impatiente, je le vois bien, de savoir qui est l’officier apparu par surprise sous la table. Ses traits virils ont conquis ton cœur et mouillé d’une larme tes yeux d’agate claire. Douce vierge, je ne te mentirai pas d’une once de cumin : ce fier personnage est né d’un coup de poing donné dans la table. Je n’avais jusqu’alors jamais ouï dire qu’il vécût en Orient un certain Languedoc Brillant, ce zouave, car je ne suis point omniscient. Et si je ne t’ai rien dit dans le troisième chant, c’est que moi-même, le poète, je n’étais pas prêt à comprendre sa présence. Maintenant, encerclé par ton cil, je ne puis plus reculer.
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