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Critiques de Mokhtar Sakhri (7)
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La liberté des dupes

Une très solide histoire de la République algérienne, de l'Indépendance au début du XXI° siècle (on aimerait la voir se prolonger jusqu'à nos jours). Bien documenté (l'auteur a longtemps été journaliste à Alger), sans concessions, et très maniable, l'ouvrage est assorti d'une chronologie et d'une courte biograpie des personnages importants. Un ouvrage de référence.
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Illusion d'un Espoir Romain

« La mort en récompense », le premier roman de cette trilogie, racontait, dans l'Algérie post-coloniale, les amours contrariées de deux jeunes gens confrontés au poids de la tradition et à la montée de l'Islamisme.

« L'illusion.. », le second, en est d'une certaine façon la suite, puisque le protagoniste, Rezoud, désespéré par la perte de celle qu'il aimait et menacé à son tour par les extrémistes, émigre en Italie. Prétexte à la description des milieux de l'émigration algérienne à Rome : jeunes « trabendistes », imams douteux soutenus par des dindes converties. Le style est ample, les descriptions abondantes font revivre aussi bien l'Algérie de la fin du XXème siècle que l'Italie. Une belle écriture romanesque à l'ancienne, par laquelle on se laisse entraîner.

On attend avec intérêt le troisième
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Les démons de la foi



Mokhtar Sakhri est né à Alger. Auteur laïque, a été instituteur puis journaliste, a vécu longtemps en Italie et en France. Il a publié plusieurs essais, romans, livres d'histoire comme « La liberté des dupes, le Roman de l'Algérie », du théâtre, de la poésie. Il éclaire ici (au sens littéral du terme !), par cet essai de philosophie historique, notre connaissance si imparfaite des ressorts de la séculaire opposition entre civilisation occidentale et monde arabo-islamique, faite d'ignorance réciproque, de mépris et de ressentiment. Une clé parmi d'autres pour comprendre – sans excuser en aucune manière la violence et le crime - les événements qui secouent notre pays – et pas seulement - aujourd'hui.

L'ouvrage commence par une histoire de la vie du Prophète Muhammad, ses influences, ses rencontres avant la Révélation, ses combats contre les tribus, sa conquête, l'extraordinaire progression de l'Islam au 7ème siècle. Avec les empires arabo-musulmans éclot une civilisation qui produit une oeuvre gigantesque constituant un jalon important dans le cheminement de l'homme vers le progrès, celui qui permet entre autres de faire la liaison entre les penseurs grecs (Platon et Aristote) et le siècle des Lumières.

Cependant, selon l'Islam, la philosophie et les spéculations intellectuelles poussant à franchir les limites de la Foi, sont inacceptables. En terre d'Islam comme en Occident, la foi l'emporte d'abord sur la raison dans un monde dominé par la peur des incertitudes. Les hommes d'exhortation prennent donc le pas sur les hommes de démonstration (cf : Galilée, mais aussi Jean Hus ou Giordano Bruno …). C'est Blaise Pascal qui fera la synthèse dans son fameux pari : Si Dieu existe, l'homme gagne tout ; s'il n'existe pas, il ne perd rien. Donc, on a tout intérêt à faire le pari de l'existence de Dieu.

Car la science moderne a de quoi bousculer bien des croyances. Aujourd'hui, pour la majorité des jeunes d'Occident, Dieu ne représente plus la moindre préoccupation. Et c'est Jean-Paul II qui déclare : « La Foi et la Raison sont comme deux ailes avec lesquelles l'esprit humain s'élève vers la contemplation de la Vérité. » Sauf que, dans la société arabo-islamique, ce genre de discours représente un blasphème. Avicenne et Averroès, extraordinaires penseurs du Moyen-âge, risqueraient d'être égorgés aujourd'hui.

Les motifs de l'incompréhension réciproque entre les deux mondes se sont terriblement aggravés au XXème siècle : la folle théorie de la supériorité de la race blanche, une opinion qui imprègne hélas encore bien des esprits égarés,  la colonisation qui a asservi, exploité et humilié les peuples, la production pétrolière, l'instrumentalisation de la religion et du mythe du panarabisme pour le maintien au pouvoir d'élites corrompues, la misère et les émeutes de la faim au Maghreb et au Moyen-Orient … sans compter la plaie ouverte que constitue la politique de l'Etat d'Israël en Palestine.

L'ignorance facilite les confusions qui permettent les raccourcis, lesquels font naître les préjugés. Cela vaut pour les deux mondes, occidental comme arabo-musulman !

Dans une langue parfois poétique et toujours accessible, truffé de références aussi éclairantes que parfois surprenantes, Mokhtar Sakhri donne à réfléchir dans cet essai publié en 2007. Il fait ainsi le pari de la connaissance et de la vérité historique. Entre lumière et obscurantisme, alors que la lutte de la Foi et de la Raison continue à faire des milliers de victimes jusque dans nos rues, il a choisi son camp : celui du bien, du vrai, de l'interdiction de nuire à autrui, du respect des autres et de soi-même. Des valeurs communes à l'Islam et à la philosophie des Lumières. On sort de cette lecture, nécessaire, à la fois sonné et plus clairvoyant.
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Illusion d'un Espoir Romain

Comme pour le premier épisode de l'histoire mouvementée du héros Rezoug Bendriss (La mort en récompense), une fin tragique est évoquée dès le titre. Pourtant, c'est l'itinéraire d'une résilience exemplaire et d'un bonheur retrouvé que raconte ce deuxième volet.

Nous avions laissé Rezoug anéanti à la nouvelle de la mort tragique de sa fiancée Menouba et de ses parents, avec l'écroulement de ses rêves de promotion sociale après son embauche à la Sonatrach. Mais, en cette année de 1993, la folie meurtrière des assassins islamistes étreint Alger. Enseignants, journalistes, leaders d'opinions, médecins, policiers sont cruellement abattus, égorgés par des commandos de fanatiques au nom de l'Islam. Tous ceux qui vivent à l'occidentale sont considérés comme des ennemis à abattre. Pour Rezoug, une ligne de conduite s'impose : trouver le moyen de venger la mort de la jeune fille qu'il aimait depuis le lycée. Il s'engage dans une organisation contreterroriste pour retrouver l'émir autoproclamé responsable de l'enlèvement de Menouba et de l'exécution de ses parents.

L'action des cellules résistantes n'est cependant pas plus humaniste que celle des assassins … Rezoug est vite repéré par les islamistes et sa vie rapidement menacée. Il doit quitter l'Algérie. Avec l'aide de membres de la police, il débarque à Rome sans emploi, sans parler la langue, mais bénéficie de la solidarité de nombreux algériens installés en Italie pour y faire du trabendo, des trafics en tous genres, ou agir dans la délinquance. Rezoug se refuse à de tels expédients. Il doit simplement survivre, sous une fausse identité qui lui pèse, le temps de se faire oublier des extrémistes qui ont mis sa tête à prix. Plein de sentiments contradictoires, plongé dans la tristesse d'avoir privé de vie deux extrémistes, il éprouve la solitude de l'exilé mais se lance avec courage et détermination dans l'étude de l'italien, et bénéficie d'un emploi de plongeur dans un restaurant de la Ville éternelle, qui devient pour lui un havre de paix et dans laquelle il va rencontrer à nouveau l'amour absolu.

Mais le sort s'acharne. La vie de Rezoug va à nouveau basculer … Il est des destins marqués par le mauvais sort. Pendant tout le roman, on se demande ce que signifie le titre funeste … jusqu'à la scène finale.

L'histoire racontée par Mokthar Sakhri se déroule parmi une foule de personnages attachants, dans une langue foisonnante s'enroulant comme les pampres d'un cep de vigne autour d'une trame parfois difficile à suivre, où les subordonnées s'enchaînent pour former des phrases interminables. Comme la lecture d'un roman du XIXème siècle, avec des retours en arrière, des descriptions évocatrices de décors, de mobiliers, de sagas familiales, le lecteur s'immerge dans un temps pas si lointain mais terriblement dépassé. En revanche, le processus de manipulation mentale opéré par les islamistes, leurs façons de procéder et les ravages qu'ils provoquent sont tout à fait actuels.

La fin est déconcertante, tellement inattendue. Mais le suspens reste entier !
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La liberté des dupes

L’Algérie, pays de lumière, si loin, et pourtant si proche …



Pour ma génération, ancrée dans le souvenir de la seule guerre qu’elle ait connue (le mari de ma sœur aînée était mobilisé sur un point sensible de la frontière et nous attendions tous la fin du conflit, quel qu’en soit le prix à payer), l’Algérie reste une plaie mal refermée.



Sans concession, sans complaisance, Mokhtar Sakhri livre ici une histoire de son pays qui fait froid dans le dos. Tout ce qu’il raconte de la lutte pour l’indépendance, des exactions commises de deux côtés, puis de la dérive des pouvoirs publics complètement rongés par la corruption et le népotisme, entraînant la riposte islamiste …



Tout ce qui est décrit là, c’est ce qui se passe aujourd’hui à l’échelle du monde arabo-musulman. Un peu comme on devrait se souvenir du contenu du sinistre ouvrage d’Adolf Hitler « Mein Kampf » … mais que personne n’avait lu !



Ce livre a été publié en 2008. Il faut se remettre dans le contexte. Différent de celui d’aujourd’hui ? … et pourtant !



Si on veut comprendre ce qui se passe dans nos sociétés privilégiées, face à la misère des peuples du sud de la Méditerranée, il faut lire cette histoire d’un grand pays, pourvu de richesses naturelles, doté d’une population jeune et bien formée, pleine d'ardeur et cependant tiraillée entre tradition et modernité.



Victor Hugo disait : « La misère porte le peuple à la Révolution, et la Révolution ramène le peuple à la misère. »



Au vide politique et à l’absence d’Etat après l’Indépendance, l’Algérie doit le surgissement de l’islamisme qui voit les mosquées et leurs imams dispenser l’aide aux plus déshérités avec le Front Islamiste du Salut, puis devenir un réseau électoral d’une redoutable efficacité auprès de populations pour la plupart illettrées (du moins en Arabe classique) en septembre 1988, décidé à prendre sa revanche sur le F.L.N. et son socialisme spécifique. Car les fondamentalistes sont résolus à rayer le concept de démocratie (qui n’existe pas dans le Coran) de leur univers et à traiter les femmes comme quantité négligeable.



Sitôt enfin instauré, le multipartisme aboutit hélas au pronostic de plus de 300 députés sur 430 pour les islamistes. La consultation est annulée le 11 janvier 1992, l’armée devenant le seul garant de la démocratie et inaugurant une décennie inouïe de violence : attentats, massacres, assassinats (en particulier de journalistes), répression sanglante.



Soyons francs, pour nous les Français, ce qui se passe alors en Algérie ne nous intéresse guère. Et nous avons bien tort car la lutte des factions – les religieux, les laïques, les tenants du collectivisme, les intellectuels formés à l’occidentale, les partisans de la spécificité Kabyle toujours rétifs à l’arabisation à outrance, retentit aussi chez ceux qui ont choisi de venir émigrer en France …



Cette lecture m‘a beaucoup donné à réfléchir. J’ai furtivement rencontré l’auteur à une réunion de signature d’un autre ouvrage sur l’Algérie … Pétri des valeurs humanistes du siècle des lumières, Mokhtar Sakhri ne vit plus en Algérie. Il donne un satisfécit global à l’armée algérienne face à la hiérarchie du pouvoir, une société pyramidale qui tire son bien-être du pouvoir et n’accepterait pour rien au monde la rupture d’un statut quo garant de sa pérennité…



Une histoire cruelle, révoltante à maints égards, à méditer pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui dans nos cités sensibles … et nos salles de spectacles.


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Justice pour Irak !

Pamphlet virulent (et très bref : 60 p.) sur la politique américano britannique dans la péninsule arabique et, plus largement, le Moyen Orient. On pourrait penser que le trait est un peu forcé, mais Mokhtar Sakhri est un excellent journaliste et l’ouvrage est une mine d’informations historiques sur les manœuvres des puissances occidentales pour la mainmise sur le pétrole. Le portrait de Saddam est aussi nuancé, tyran sanguinaire, certes, mais aussi réformateur éclairé. Et la catastrophe à laquelle ont abouti ces politiques brutales et naïves donnent en grande partie raison à l’auteur
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La mort en récompense

C’est une belle histoire que nous conte ici l’écrivain-poète-historien-journaliste français d'origine algérienne, mais, ainsi que peut le laisser entrevoir son titre, elle finit terriblement mal. A travers la vie de deux jeunes gens auxquels la vie semble sourire, Menouba et Rezoug, c’est l’histoire dramatique de l’Algérie d’après l’indépendance qui nous est livrée dans sa plus parfaite cruauté.

Ces deux jeunes gens aussi beaux que doués et qui veulent à tout prix s’en sortir suivent d’abord la trace de leurs pères, et la plus grande partie du roman raconte comment Kader et Zouina, les parents de Menouba, ont franchi les obstacles qui leur ont permis, après 1962 et malgré tout, de s’extraire de leur sort atavique de paysans sans terre et de venir à Alger grâce à leur travail et à l’appui d’un couple d’instituteurs particulièrement bienveillants.

Kader est fasciné par le métier d’enseignant mais il parvindra seulement à décrocher le Certificat d'Etudes. Il finira par occuper un poste d’appariteur dans un grand lycée d’Alger et sa fille passera sa licence de lettres. Elle viendra en France, émerveillée, choyée par son ancienne institutrice … mais n’oublie pas son ami, devenu son amour de jeunesse, qui occupe son cœur depuis le lycée. Rezoug, malgré son baccalauréat, acceptera un emploi qui lui permet de tisser un réseau de connaissances. Ils vont bientôt toucher au but de leur vie : se marier !

Cependant, il faut aller à l’encontre des traditions familiales et leur projet n’est pas encore envisageable dans l’immédiat. Et puis, en 1993 éclate la guerre civile. Celle dont on ne parle pas en France. Après tout, les français ont été contraints de quitter brutalement cette terre privilégiée et le pays est en proie aux factions rivales des vainqueurs et à la corruption … Il faut lire l’ouvrage de Mokhtar Sakhri sur l’histoire (qu'il intitule "Le roman") contemporaine de l’Algérie.

Car le désordre et l’anarchie qui embrase l’Algérie après l‘assassinat de Mohammed Boudiaf en juin 1992 et durant la décennie suivante, l’explosion des attentats perpétrés par des « éléments incontrôlés », les bandes d’islamistes furieux aux ordres d’émirs autoproclamés a pour effet non seulement de détruire les capacités de développement de ce pays qui nous fut si proche, mais encore de lui faire franchir un affreux bond en arrière.

Ainsi, cette belle histoire de progrès social et intellectuel narrée comme un conte des mille et une nuits dans une langue précieuse et selon une construction parfois enluminée de formules poétiques, se fracasse sur la mort tragique et stupide de la courageuse héroïne. Car l’élévation intellectuelle et le progrès issu des préceptes des Lumières, et tout spécialement l’égalité des sexes, sont des concepts complètement en contradiction avec religion d’Etat et hélas introduits par les anciens colonisateurs. Menouba et Rezoug paieront le prix suprême et recevront, elle la mort et lui le désespoir, en récompense de leurs multiples efforts. Mais pour nous, il restera à découvrir la suite de cette saga.
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