Citation de Cielvariable
On l’autorisait désormais à lire son courrier ; il se doutait bien, toutefois, que certaines lettres étaient retenues. La veille, une véritable perle était passée à travers les mailles du filet tendu par Reuben. Une lettre de la Société David et Jonathan, nouveau regroupement de jeunes tapettes juives au cœur tendre. Ils ne lui voulaient que du bien, « Sholem, il est plus facile de sortir du placard entouré d’amis », et ils l’invitaient à assister au bal de Pourim à titre d’invité d’honneur. À chacun sa reine Esther. On le considérait également comme assez rétabli pour pouvoir lire des journaux et des magazines. Somme toute, ses collègues ne l’avaient pas trop malmené – il n’avait eu que ce qu’il méritait –, mais il était évidemment exclu que son contrat de télé soit renouvelé. Au diable tout ça ! Pendant ce temps, ainsi qu’il était à prévoir, des publications gaies de partout se portaient à sa défense. Il avait fait la couverture de The Body Politic, le magazine canadien des homophiles. Joshua le martyr. À la librairie Glad Day de Toronto, l’édition de poche des Volontaires – son hommage, hélas plus du tout à jour, aux hommes qui s’étaient battus dans les Brigades internationales en Espagne – se vendait mieux que le dernier Gore Vidal. Mandate : The International Magazine of Entertainment & Eros avait obtenu une interview avec sa mère ou, plus vraisemblablement, avait accepté la proposition qu’elle leur avait faite. Esther Shapiro, née Leventhal, mieux connue sous le nom d’Esty Blossom.
