La presse se déchaînait contre moi, mais parlait finalement très peu du sort des juifs allemands, que j'avais voulu dénoncer. Les journaux de droite et d'extrême-droite, eux, s'en donnaient à cœur joie, de L'Intransigeant à Gringoire :
"La paternité de ces attentats revient au parlementarisme pourri grâce auquel les démocraties ont accueilli chez elles les émigrés politiques et les israélites...
La juiverie mondiale, le bolchévisme juif, la tourbe internationale et criminelle a fait son nid à Paris...
La clique d'émigrés juifs, de métèques et cette ligue mondiale juive ont mis l'arme dans les mains de Grynzpan comme elles l'avaient fait avec Frankfurter."
Au milieu de ce flot de haine raciste, seule la comparaison avec David Frankfurter, cet étudiant juif yougoslave qui avait assassiné un activiste du parti nazi suisse, Wilhelm Gustloff, à Davos en 1936, pouvait me flatter. C'était une bien maigre consolation car pour le reste, j'étais littéralement abattu. Moi qui voulais faire barrage à l'antisémitisme, j'en avais ouvert les vannes.