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Citation de Charybde2


Celui qui apporte la soupe signifie qu’il est dans le mouvement, pas au bord.
Il a fallu de l’entrain pour faire la soupe (sans compter le transport, l’installation, la proposition à tous de se servir en faisant le tour avec les petites timbales pleines, etc.). Un entrain minimal pour se déplacer en fin de journée ; sortir.
Le plus difficile est de sortir de chez soi ou de ne pas y rentrer, c’est pourquoi le mouvement à son début posa comme phrase qu’on ne rentrerait pas chez soi.
Quelle colle nous tient chez nous ?
Quelle colle assez puissante nous tient chez nous pour que même par beau temps en week-end et en vacances, sans obligations particulières, les enfants grands ou gardés, la télé étant ce qu’elle est, peu de goût pour la lecture et les jeux de société, certes une bonne série certes Call of Duty – mais tout de même ?
Quelle colle,
sinon l’habitude.
La liste est courte et sûre des raisons qui de toute éternité me font sortir : un film ; un repas de famille ; un resto entre amis ; de moins en moins un verre au bar ; le feu d’artifice du 14 juillet ; une initiative de la mairie.
Mais sortir pour rester sur une place, avec d’autres, du jamais vu.
Et qu’est-ce qu’on va faire ?
L’ennui.
Le ridicule du partage de la soupe.
(Une soupe peut-être pas bonne.)
Des phrases entendues mille fois. Des banalités, des redites.
Les cassos du coin.
On va faire l’ennui.
Cette colle très puissante qui te contient chez toi.
Le bon canapé.
Le dehors, ouvert à tous vents.
Cette conquête, prise de guerre, d’écouter des inconnus. De causer avec des. Que tu ne rencontres jamais qu’en reportage – l’ouvrier agricole, l’assistante sociale, les très vieux militants du PC.
Et puis la facilité que c’est, dont tu ne te doutais pas.
Le goût, qui commence à venir.
Des solutions à inventer pour continuer quand il fera froid.
Alors pourquoi tant d’autres encore collés ? D’où et de quoi de cette colle la puissance familière ? L’idée que les familles sont dedans, que la vie familiale ne peut être que dedans.
Pourtant les premières fois des enfants sont là, des petits, et un ado de douze ou treize ; sagement collés aux parents, puis très vite gambadant par toute la place, courant après les chiens, divaguant. C’est eux qui ont le moins froid, qui s’amusent le plus, qui trouvent comment faire dehors.
Tout de même cette colle très puissante, quadragénaire.
Petits, l’été, on installait nos chaises à côté de celles des grands, dans la rue, le long des maisons, regardant la route. On racontait la vie. On bavait on bavardait on bavassait. On suivait au mur d’en face le lézard montant le long des lézardes. Les nids collés des étourneaux sous les toits, savamment maçonnés ; tous les détails du monde.
Quelque chose de ça s’est échappé qu’on cherche, taraudés par le souci. Plus le monde, mais son souci. Et si tout ça crevait ? Et si la dernière abeille tombait à mes pieds, là ? Et si plus jamais ma vue ne disparaissait l’été dans un pare-brise pourri d’insectes ?
Dans cette peur, se couvrir de l’habitude du chez-soi, couverts de l’excuse des cassos, de la météo.
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