1908. - Le peintre qui a trouvé sa technique ne m'intéresse pas. Il se lève chaque matin sans passion, et, tranquille et paisible, il poursuit le labeur commencé la veille. Je lui soupçonne un certain ennui propre à l'ouvrier vertueux qui continue sa tâche, sans l'éclair imprévu de la minute heureuse. Il n'a pas le tourment sacré dont la source est dans l'inconscient et l'inconnu ; il n'attend rien de ce qui sera. J'aime ce qui ne fut jamais.
Le souci doit être l'hôte habituel et constant du bon atelier. Le souci est comme une équation entre la palette et le rêve. Il est le ferment du nouveau ; il renouvelle la faculté créatrice ; il est le témoin d'erreurs sincères et de l'inégalité du talent. L'homme est alors visible chez l'artiste, et celui qui regarde son oeuvre est plus près de lui.