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Citation de Arimagu


À l’époque où je m’installai à Paris – loin du lieu de ma naissance, loin de ma tristesse d’enfant unique gâté comme peuvent l’être les enfants uniques et, qui plus est, les enfants d’exilés (nos parents nous arrachent à nos potagers natals et nous transplantent dans un terreau nouveau pour une vie meilleure, promesse impossible à tenir et grosse de culpabilité), loin égale- ment de ma province d’accueil genevoise, si peu mienne, comme du reste n’importe quelle autre province de la planète Terre – à l’époque donc où, âgé de trente ans, je m’installais dans ce centre du monde, dans cette ville, ce par(ad)is, nécessairement perdu, il me sem- blait évident que je le faisais pour une seule et unique raison: pour être encore plus libre. Je ne dirais pas comme Pic, pour imiter sur terre la vie des chérubins, mais presque. Je me souviens de mes premiers mois à Paris : j’en étais ivre, je jubilais, je perdais la tête. J’étais le vagabond médiéval, un brin de rien, invisible, injoi- gnable. Tel un Scythe venant des bords du Pont-Euxin, un pèlerin amoureux de son ombre, j’avais traversé l’Europe, ne me liant à personne, me nourrissant de rien (du pain, des olives et des figues), m’endormant sur des pierres chaudes nappées de lichen. Et, après l’avoir ainsi toute traversée, j’avais choisi Paris pour m’y arrêter, pour un moment, for a while. Bref, Paris, c’était ma gageure, mon image adventice, celle dans laquelle je m’étais reconnu, que j’avais passionnément voulu mimer. Il m’avait fallu Paris, et cela s’était fait.
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