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Citation de AMR_La_Pirate


Préface d’Antan d’enfance : « [Ces textes] disent de mon enfance la magie, le regard libre, le regard autre, les effets qui ont structuré mon imaginaire, modelé ma sensibilité, et qui grouillent […] dans mes ruses d’écriture ».

Mémoire, je vois ton jeu : tu prends racine et te structures dans l’imagination, et cette dernière ne fleurit qu’avec toi (p. 71).


Sur la maison :
Les nègres avaient déjà donné dans les cases en paille, puis dans les cases en bois puis dans les cases en fibrociment… Vu leur prédisposition à être rayées des surfaces de notre boue, ces qualités de cases ne furent jamais vraiment des données du Bon Dieu. […]Le ciment était non seulement porteur d’avenir mais aussi d’un art de vivre (p. 44).

Ô mes frères, vous avez cette maison que je ne pourrais décrire, sa noblesse diffuse, sa mémoire de poussière. De la rue, elle semblait un taudis. Elle signifiait la misère du bois dans un Fort-de-France qui commençait à se bétonner les paupières. […] Située au mitan de la ville, elle nous filtrait la ville (p. 185).

Sur les mères :
Les manmans ne se reposaient jamais. Elle changeaient simplement de travail et de rythme (p. 84).

Les manmans cultivaient la fierté. Il était impensable que leurs enfants puissent ne pas bien manger. La hantise du plat vide est de culture créole, elle rode dans l’histoire et parvient jusqu’aux cases de la ville (p. 177).

Le négrillon passait les journées à la fenêtre, suivant des yeux Man Ninotte à travers le quartier. Elle n’était jamais plus à l’aise que dans l’apocalypse. S’il n’y avait plus d’eau, elle ramenait de l’eau. S’il n’y avait plus de poissons, elle brassait du poisson. Elle trouvait du pain chaud. Elle trouvait des bougies. Elle trouvait des paquets de rêves et les charriait en équilibre dessus son grand chapeau. Et surtout, elle ramenait […] des objets perdus sous une gangue sans prénoms. […] Il la voyait disparaître au bout de la rue, réapparaître à l’autre, massive et puissante sous les ailes de son chapeau, parlant fort, saluant tous, distribuant des conseils que nul ne demandait. Pour cette adversaire des déveines, le désastre était un vieil ami. Elle s’y démenait à peine plus que d’habitude et nous en extrayait le meilleur (p. 121-122).

Sur son père :
Le papa déployait un ramage du mulâtre, dense et gonflant (p. 115).

Sur la langue créole :
La langue créole avait de la ressource dans l’affaire d’injurier […] par son aptitude à contester (en deux trois mots, une onomatopée, un bruit de succion, douze rafales sur la manman et les organes génitaux) l’ordre français régnant dans la parole. Elle s’était comme racornie autour de l’indicible, là où les convenances du parler perdaient pied dans les mangroves du sentiment. Avec elle, on existait rageusement, agressivement, de manière iconoclaste et détournée. […] La langue créole est un bel espace pour les frustrations enfantines, et possède un impact souterrain de structuration psychique inaccessible aux structurations établies de la langue française (p. 69).
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