De l'examen des compositions d’Augusta Holmès il résulte deux remarques expliquant, je crois, le sort si différent que hier et aujourd’hui accordent à des ouvrages en qui rien n’a changé : c’est d’abord l'évolution, si accentuée en ces derniers temps, dans l'art musical et dans l'appréciation du public pour cet art. Je n’ai pas à commenter les métamorphoses survenues de part et d’autre, progrès souvent, aberration parfois, dont il semble que le principe soit de brûler ce qu'on adora et d’adorer ce que naguère on eût brûlé comme œuvre d’obscure sorcellerie. Évidemment notre sens de la musique s’est affiné, l'éducation de notre oreille s'est à tel point perfectionnée, que certains musiciens condamnent irrémissiblement toute mélodie accessible au commun des mortels. Jusqu’aux plus fidèles partisans des anciennes formules qui sentent fléchir leurs convictions et branler leur admiration pour Meyerbeer ou Gounod !
Augusta Holmès... le nom a fière allure et sonne triomphant. Celle qui le porta fut considérée la mieux douée des femmes qui, depuis un siècle, s’occupèrent de composition musicale ; elle atteignit la célébrité et une célébrité de bon aloi, ce qui n'est pas absolument facile ou banal; elle eut la gloire d'occuper l'affiche entière de notre Académie nationale de musique — fait sans exemple jusqu'à maintenant en faveur d’une femme — et d’être fréquemment interprétée aux concerts de Pasdeloup, de Colonne, du Conservatoire, pour ne citer que ceux qui consacraient les réputations ; enfin, ses mélodies se répandirent un peu par- tout. Peu d'années se sont écoulées depuis la mort d’Holmès, et voici déjà longtemps que son nom ne figure plus sur les programmes. De son œuvre, pour- tant considérable matériellement, rien n'a survécu.
Où se trouve l'erreur ?... Dans l'éclat du passé ou dans les ténèbres du présent ?...