Citations de Philippe Pinel (13)
J'ai la conviction que ces aliénés ne sont si intraitables que parce qu'on les prive d'air et de liberté.
Les principaux symptômes […] consistent dans un air triste, mélancolique, dans un regard stupide, des yeux parfois hagards, une figure inanimée, un dégoût général, une indifférence pour tout ; le pouls est faible, lent ; d’autres fois fréquent, mais à peine sensible : un assoupissement assez constant : pendant le sommeil, quelques expressions échappées avec des sanglots et des larmes ; la presque impossibilité de quitter le lit ; un silence opiniâtre, le refus des boissons et d’aliments, l’amaigrissement, le marasme et la mort.
C'est un art peu important d'administrer correctement les médicaments: mais c'est un art d'acquisition beaucoup plus grande et plus difficile de savoir quand suspendre ou tout simplement les omettre.
C’est marrant en bouquin, mais pas pour de bon. Alors le cerveau, si bien équipé en sorties de secours, a préféré la solution pourtant périlleuse, qui consistait à se croire dérangé, plutôt que d’admettre un dérèglement de la réalité.
Je ne peux pas ici éviter de donner ma souffrance la plus décidée en faveur des qualités morales des maniaques. Je ne me suis pas rencontré, sauf dans les romans, avec les maris les plus capables, les parents plus affectueux, plus passionnés. . . Que dans l'asile de fous, pendant leurs intervalles de calme et de raison.
Je ne sais quel intérêt tendre inspire un grand rassemblement de fous, quand on songe que la plupart d'entre eux ne doivent leur état qu'à une vive sensibilité.
Francis était né amoureux. Il aimait les femmes comme d’autres aiment la musique ou la peinture. Pour Francis, l’intérêt de coucher avec une femme n’est pas tant le plaisir sexuel qu’il y trouve, que la qualité des clichés qu’il peut prendre d’elle après l’amour. Quand une femme a fait l’amour, elle a le sentiment qu’elle a tout donné à l’autre, ou presque. Si son partenaire lui demande de tourner son visage un peu à gauche, un peu à droite, de relever ses cheveux ou de les coiffer, faire s’écrouler, ébouriffer, le temps de deux ou trois pellicules, cigarette aux coins des lèvres, elle ne lui donne plus rien
Les Russes progressaient comme un rouleau compresseur, lentement mais sûrement. Inexorablement, la machine de guerre soviétique laminait la sacro-sainte terre du peuple des Seigneurs. Les chevaliers teutoniques, non seulement, avaient été reconduits à leurs frontières, mais étaient repoussés à l’intérieur. La rapidité avec laquelle les Bolcheviques avançaient laissait à Berlin encore quelques semaines ou mois pour se proclamer toujours capitale du Reich. Après il savait que l’Allemagne baisserait les bras. Si le Führer, le Grand Guide du peuple Aryen, était capturé, ce serait une capitulation sans condition : malheur aux vaincus. N’était-ce pas la politique même d’Hitler, envahissant la Pologne ? Les Polonais étaient devenus les esclaves, les bêtes de somme de l’Allemagne. Pourquoi les Allemands ne deviendraient-ils pas les esclaves des Russes ? L’Allemagne laissée aux mains des communistes.
Monsieur Weissmuller ouvre une porte, et d’un geste de la main, invite Boris à entrer.
Boris sent tout de suite la chaleur lui caresser le visage. Brusquement, il se prend à souhaiter se retrouver le plus vite possible, seul et maître de céans, afin de mieux jouir de ce luxe, de cette douceur, de toute la maison. La perspective de la visite des lieux, véritable musée d’art, lui procure un vif plaisir. Une joie un peu fébrile. Comme lorsqu’il était gamin. Savourant à l’avance le déballage d’un cadeau de Noël qu’il n’avait pas encore vu, mais qu’il s’imaginait dans le mystère de ses formes cubiques, avec son papier chamarré, brillant.
Il n’est pas nécessaire qu’un éboueur soit plus beau que l’ordure qu’il manipule, un cadre ne peut se permettre d’être surnommé Quasimodo avant même d’être entré en fonction. Je crois qu’en fin de compte ce sont les autres qui sont gênés dans leurs rapports avec moi. Moi je suis habitué à ma laideur, pas eux.
Ce 3 janvier, il remonte dans son donjon une cigarette au coin des lèvres. Sept étages en fumant. Ça vous tuerez le plus fort des plus forts. Mais lui, non, il savoure son asphyxie. Depuis le premier janvier à midi trente il n’avait plus de tabac.
Parce que sans emploi et malade, ce serait la fin. Il se souhaiterait bien de rencontrer l’âme sœur, la femme de sa vie, mais il est laid. Laid au-delà de tout, ce premier janvier comme tous les jours de l’année. Laid et pauvre.
Il a l’intime conviction qu’un jour la roue tournera, qu’il aura de l’argent
Par habitude sans lassitude, il lit les petites annonces. Recherche d’un job. Professionnellement parlant Boris a une caractéristique commune à tous les jeunes gens de sa génération : cultivé, jusqu’à une licence d’histoire, puis pauvre de sa culture de riche, il n’est strictement bon à rien, ou pas à grand-chose. Ne sachant rien faire d’autre que de penser en apprenti historien, il va de jobs en boulots précaires pour vivre au sens premier du terme : manger et dormir sous un toit. Emplois sans avenir et avenir sans emplois.