Ces grilles rappelaient constamment aux passagers des bus que
les rues d'Oran étaient meurtrières, et qu'il fallait être en cage pour
être protégé. Le jeune garçon ne se sentait libre que sur les trois
cents mètres qu'il devait parcourir à pied de la place d'Armes au
lycée Lamoricière, par le boulevard Gallieni. Son père estimait le
trajet sans danger parce que, aussi bien devant l'hôtel Martinez
qu'à l'entrée de la Banque d'Algérie, des militaires casqués,
pistolet-mitrailleur au côté, montaient la garde à l'abri de sacs de sable.
Au début, Christophe avait été impressionné, puis rapidement, leur
présence lui avait paru naturelle. Ils étaient jeunes et ils plaisantaient
entre eux, surtout lorsqu'une jeune fille passait à proximité.