AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Caliban


A Louise Colet,
]
[Croisset], nuit de jeudi, heure, [fin octobre 1851 ]

Pauvre enfant ! Vous ne voudrez dons jamais comprendre les choses comme elles sont dites ? Cette parole, qui vous semble si dure, n'a pourtant pas besoin d'excuses ni decommentaires et, si elle est amère, ce ne peut être que pour moi . Oui, je voudrais que vous ne m'aimiez pas et que vous ne m'eussiez jamais connu et, en cela, je crois exprimer un regret touchant votre bonheur . Comme je voudrais n'être pas aimé de ma mère, ne pas l'aimer, ni elle ni personne au monde, je voudrais qu'il n'y eût rien qui partît de mon coeur pour aller aux autres, et rien quii partît du coeur des autres pour aller au mien . Plus on vit, plus on souffre . Pour remédier à l'existence, n'a-t-on pas inventé, depuis que le monde existe, des mondes imaginaires, et l'opium, et le tabac, et les liqueurs fortes, et l'éther ? Béni celui qui a trouvé le chloroforme ! Les médecins objectent qu'on en peut mourir . c'est bien de cela qu'il s'agit ! C'est que vous n'avez pas suffisamment la hained la vie et de tout ce qui s'y rattache . Vous me comprendriez mieux si vous étiez dans ma peau et, à la place d'une dureté gratuite, vous verriez une commisération émus, quelque chose d'attendri et de généreux, il me semble . Vous me croyez méchant, ou égoïste pour le moins, ne songeant qu'à moi, n'aimant que moi . Pas plus que les autres, allez ; moins peut-être, s'il était permis de faire son éloge . Vous m'accorderez toutefois le mérite d'être vrai . Je sens peut-être plus que je ne dis, car j'ai relégué toute emphase dans mon style ; elle s'y tient et n'en bouge pas . Chacun ne peut faire que dans sa mesure . Ce n'est pas un homme vieilli comme moi dans tous les excès de la solitude, nerveux à s'évanouir, troublé de passions rentrées, plein de doutes du dedans et du dehors, ce n'est pas celuil-à qu'il fallait aimer . Je vous aime comme je peux ;mal, pas assez, je le sais, je le sais, mon Dieu ! A qui la faute ? Au hasard ! A cette vieille fatalité ironique, qui accouple toujours les choses pour la pius grande harmonie de l'ensemble et le plus grand désagrément des parties . On ne serencontre qu'en se heurtant et chacun, portant dans ses mains ses entrailles déchirées, accuse l'autre qui ramasse les siennes . Il y a des bons jours cependant, des minutes douces . J'aime votre compagnie, j'aime votre corps, oui, ton corps, pauvre Louise, quand, apppuyé sur mon bras gauche,il se renverse la tête en arrière et que je baise sur le cou !, Ne pleure plus, ne pense ni au passé ni à l'avenir, maisà aujourd'hui . 3Qu'est-cequ ton devoir ? L(exigence de chaque jour", a dit Goethe . Subis-la cette
exigence et tu auras le coeur tranquille .
Prends la vie de plus haut, monte sur une tour (quand même la base craquerait,crois-la solide ) ; alors tu ne verras plus rien que l'éther bleu tout autour de toi . Quand ce ne sera pas du bleu, ce sera du brouillard;qu'importe, si tout y disparait noyé dans une vapeur calme . Il faut estimer une femme pour lui écrire des choses pareilles .
........
Commenter  J’apprécie          70





Ont apprécié cette citation (6)voir plus




{* *}