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Citation de VALENTYNE


C’était toujours les fils à papa qui ne demandaient qu’à abuser de leur pouvoir.
« Non merci, ai-je répondu. Où est votre père ?
– En maison de repos. » Il m’a tourné le dos pour s’éloigner.
« OK, à prendre ou à laisser, juste un verre. »
J’ai refusé et suis sortie. Devant la réception, un autre type m’a accostée.
« Hé. C’est un abruti. Il raconte que des conneries. »
Il s’appelait Stretch. Il était chargé de l’entretien et vivait dans l’une des chambres. Il était aussi bronzé qu’un ouvrier du bâtiment l’été mais, vu sa dégaine, il ne donnait pas l’impression d’avoir un emploi. Il portait un jean et une chemise en denim du même bleu délavé, et avec sa banane et ses cheveux gominés, on se serait cru en 1956 et pas en 1976. Il me faisait penser au jeune paumé dans le film Model Shop de Jacques Demy qui tue le temps avant d’être appelé sous les drapeaux, qui traîne, suit une beauté en décapotable blanche dans les rues et sur les hauteurs d’Hollywood.
« Écoute, faut que je passe la nuit dehors à surveiller la voiture de course de l’autre abruti, m’a expliqué Stretch. Je ne dormirai pas dans ma chambre. Et toi, tu as besoin d’un lit. Pourquoi tu n’y dormirais pas ? Je te promets de ne pas te déranger. Il y a la télé. De la bière dans le frigo. C’est rudimentaire mais c’est mieux que de devoir partager un lit avec lui. Je frapperai à la porte demain matin pour venir prendre ma douche, mais c’est tout, je te jure. Je déteste quand il essaie d’abuser des gens. Ça me dégoûte. »
Il faisait preuve d’une charité authentique, le genre qu’on ne remet pas en doute. J’avais confiance en ça. En partie parce qu’il me rappelait ce personnage de Jacques Demy. J’avais vu Model shop avec Sandro, juste après notre rencontre, un an plus tôt. La dernière réplique était devenue une blague entre nous. « Peut-être demain. Peut-être jamais. Peut-être. » Ça commence par les mouvements saccadés de derricks devant la fenêtre du nid d’amour d’un jeune couple à Venice Beach, le paumé et une petite amie dont il se fiche. C’était la scène préférée de Sandro et la raison pour laquelle il adorait le film, les puits de pétrole juste devant la fenêtre, qui montaient et descendaient, encore et encore, pendant que le garçon et la fille se prélassaient au lit, se disputaient, faisaient leur train-train dans leur bungalow décrépit, à l’ombre des bâtiments industriels. Après l’avoir vu, nous employions souvent le mot « bungalow » tous les deux.
« Tu viens dans mon « bungalow » ce soir ? me demandait Sandro même si en réalité il vivait dans un immeuble en verre et fer forgé où chaque étage faisait plus de 370 mètres carrés.
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