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Citation de coco4649


LA DEUXIÈME ÉLÉGIE
...
Amants, - accomplis l'un dans l'autre -, je vous demande
qui nous sommes. Vous vous saisissez.
Avez-vous des preuves? Voyez, il arrive que mes mains se rencontrent
ou qu'elles abritent l'usure de mon visage.
Cela me rend conscient quelque peu.
Pourtant, qui oserait être pour si peu ? Mais vous
qui grandissez dans l'extase de l'autre jusqu'à ce que, vaincu, il vous implore :
assez ;
vous qui vous enrichissez sous les mains de l'autre comme le raisin des bonnes années ;
vous qui, parfois, vous abandonnez, seulement parce que l'autre prend le dessus,
je vous demande qui nous sommes.
Je sais, vous vous touchez avec tant de bonheur,
parce que la caresse vous préserve,
parce que l'endroit que vous couvrez tendrement ne se dérobe point,
parce que sous elle vous pressentez la durée absolue.
Ainsi vous promettez-vous l'éternité, presque dès l'étreinte,
pourtant, lorsque vous surmontez la frayeur du premier regard,
l'attente près de la fenêtre, et les premiers pas ensemble une fois
à travers le jardin : amants est-ce encore vous ?
Quand vous portez une bouche vers l'autre et l'y appliquez pour boire,
oh, comme il échappe étrangement à son acte celui qui boit !
La prudence des gestes sur les stèles attiques ne vous a-t-elle jamais étonnés ?
Amour et adieu, étaient avec tant de légèreté posés sur les épaules,
qu'ils semblaient faits d'une autre étoffe que chez nous.
Rappelez-vous les mains, comme elles reposent sans poids
alors que les torses sont bâtis puissamment.
Maîtres d'eux-mêmes, ils savaient: nous sommes cela,
et ceci, de nous toucher ainsi, nous appartient ;
les dieux nous saisissent avec plus de force. Mais c'est affaire des dieux.
Puissions-nous trouver, nous aussi, une parcelle de terre fertile
qui nous appartienne, claire, étroite et humaine,
retenue entre courants et rochers.
Car notre propre cœur nous dépasse toujours, comme celui des anciens.
Et il ne nous est plus donné de le reconnaître dans des images apaisantes,
ni dans des corps divins, où plus grand
il se contient.

Traduction de Lorand Gaspar



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