Raphaël Glutz interview 3/3 - Inspiration et technique
Il était comme un rat en cage. Acculé, même le plus pacifique des rats deviendra agressif et attaquera ses assaillants, n’ayant plus d’autre choix.
- La meilleure défense c’est l’attaque. Murmura-t-il d’un ton sombre et résigné.
Le visage tuméfié, l’homme courait de façon désespérée le long de la route détrempée et boueuse. Des gouttes de sang ruisselaient le long de sa nuque et se mélangeaient à la pluie tropicale, tachant sa chemise blanche en lambeaux.
Enfin libéré, il réalisa soudain quelque chose d'étrange. Le produit ne faisait pas effet. Juste après l'injection, il avait ressenti quelques secondes d'étourdissement, sa vision s'était temporairement troublée, mais maintenant, plus rien. Plus son corps était traumatisé ou confronté à des épreuves, plus il s'habituait et réagissait. Dans ce cas précis, il avait développé un système de défense contre l'anesthésiant. Cette conclusion le fit frissonner. Cette puce qui lui sauvait la vie était aussi en train de prendre le contrôle de tout son corps.
Bien que plus massif et plus imposant, Sergueï était cloué au canapé. Il savait que X venait de la CIA, mais ce qui l’impressionnait, c’était la sorte de rage intérieure, de méchanceté cruelle qui transparaissait même à travers ses verres sombres. Une allure de fantôme aux pouvoirs infinis.
C’est peut-être pour cela qu’il voulait tant l’éliminer. Il le rendait mal à l’aise. Il le faisait se sentir dominé et il détestait ça.
Son cerveau l’abandonnait, sa tête était proche de l’explosion et son corps laissé sans pilote. Il avait l’air d’un mort-vivant. Son état lui aurait certainement valu de gagner le casting du clip de Thriller. Le battement constant dans sa tête lui faisait mal et le rendait fou. Il avait parfois l’impression qu’un nain était dans son crâne et s’amusait seconde après seconde à planter des clous contre la paroi.
Le choc fut d’une violence inouïe. La voiture partit dans une embardée spectaculaire, ricochant de mur en mur sur une bonne cinquantaine de mètres.
Le trou noir, puis une lumière. Il discerna un visage. L’agent de police lui hurlait dessus mais il n’entendait rien. Redressant sa tête, levant ses mains, il fut horrifié. Il était couvert de sang.
Jetant le couteau au sol, il s'assit sur ses cuisses, s'apprêtant à déboutonner le pantalon de Mary. Elle profita de ce mouvement d'assise pour basculer violemment la chaise vers l'arrière tout en relevant sa cagoule. Ils tombèrent tous les deux à la renverse. L'homme affalé sur elle de tout son long, poussant des jurons d'énervement, elle saisit de sa main gauche le couteau au sol et, dans un cri d'horreur, le lui planta d'un geste vif dans le cou, puis s'extirpa d'un bond de son étreinte. Étourdi, le couteau encore planté dans le cou, l'homme se remit sur ses genoux. Du sang giclait de son artère carotide.
- Sale pute ! Je vais te couper en morceaux ! éructa-t-il en tentant de se relever, se tenant la gorge de la main gauche.
Ne lui laissant pas le temps de reprendre ses esprits, elle saisit le lourd pied-de-biche près de la grosse caisse en bois et, avec l'élan de tout son corps, le fracassa contre son crâne rasé.
- Je t'emmerde, gros tas ! cria Joe, crachant du sang.
Il hurlait pour compenser sa douleur et frappait désespérément dans tous les interstices qu'il apercevait. Les deux hommes avaient le visage tuméfié et rouge de sang.
- Sauf que je ne suis pas qu'un gros tas ! Je suis un putain de capitaine des forces spéciales ! Et toi, le petit pilote marine, tu ne fais pas le poids. continua-t-il, lui postillonnant du sang au visage.
Merde... J'ai vraiment sous-estimé ce type, pensa Joe, alors qu'un autre coup d'une violence sans précédent s'abattit sur son orbite droite. Il est beaucoup trop fort, physiquement et techniquement il encaisse tout... Sa vision se troublait. Il était sur le point de perdre connaissance.