Figure 23. Le Secret de l’Espadon, tome trois, planche 37, strip 2. Prenant place au centre de la planche, cette bande présente une composition très réussie. La succession des petites vignettes sur les pourtours de la case centrale permet d’illustrer les nombreuses dis-
cussions techniques que s’échangent les membres de l’équipage du sous-marin à l’appro- che des bâtiments ennemis. L’organisation des vignettes dialogue pour sa part avec l’orien- tation des figures: qu’on observe comment la direction des regards des personnages, illustrée par les flèches ci-dessus, est structurée en paires qui se répondent et rythment ces sept cases. De la sorte, on comprend que la mécanique du sous-marin est parfaitement réglée, que les hommes travaillent de concert, ce qui laisse présager d’une approche très technique et professionnelle de la confrontation qui s’annonce, mais également de l’harmo- nie qui règne au sein des forces alliées. Enfin, les choix colorimétriques font écho à la com- position. Le fond jaune et chaleureux des vignettes périphériques contraste avec les domi- nantes noire, verte et bleu de la case centrale, où apparaît l’ennemi. Les croix que dessine le viseur du périscope achèvent de donner à cette vignette centrale un ton morbide et sinistre.
De Mortimer, on a gardé la mémoire de l'invention de l'Espadon, cette arme redoutable, grâce à laquelle le monde évitera le joug de la tyrannie. Cette découverte fera de Mortimer un savant reconnu, estimé par ses pairs. Malgré une carrière riche de péripéties, on ne lui connaît pas d'autres inventions de cette ampleur. Pour Mortimer, l'Espadon est une œuvre fondatrice.
De L'Espadon, Jacobs tirera lui aussi une notoriété qui ne s'est pas démentie depuis. Mais sa découverte, elle, n'a pas encore été mise à jour, alors même que ses effets se font sentir bien au-delà de son œuvre.
Si l'invention de Jacobs est restée mal connue, c'est qu'elle a été éclipsée par celle de Mortimer. Plus exactement, que le premier effet de la découverte du professeur, assourdissant et éblouissant, masque par son éclat la principale conséquence de la découverte de Jacobs. Et pour cause : la concordance entre les deux découvertes est totale. Non contents d'entamer leur étude respective au même moment, les deux hommes l'achèvent ensemble. Mieux encore : les effets paroxystiques et ravageurs des deux inventions s'exercent exactement au même endroit, à la page cinquante-trois du troisième volume de l'actuelle édition du Secret de l'Espadon.
On connaît relativement bien l'Espadon, ses mérites et tout ce qu'il a de novateur en matière de science aéronautique et militaire. Mais quelle est l'invention de Jacobs ? Quel mystère recouvre l'embrasement de l'empire de Basam Damdu ? Qu'a donc découvert Jacobs sur sa table à dessin ?