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Citation de Noor1996


Le matin, le ronronnement d’un car qui semblait glisser sur une route couverte de miroirs m’a tiré de mon sommeil. Je lui ai fait signe de s’arrêter en agitant les bras. Une porte récalcitrante s’est entrouverte en gémissant. Le conducteur m’a demandé d’un ton blasé qui suggérait que j’étais loin d’être le premier à le héler en plein désert : « Vous allez où ? » Je lui ai tendu un billet de dix dollars pour toute réponse, justification ou excuse.
Peu m’importait dorénavant où j’allais. L’Amérique était trop grande pour je fasse le difficile ; trop jeune, aussi, pour que je sois pressé. Le car était à moitié vide. Une vingtaine d’histoires déprimantes ont levé des yeux éteints vers moi, puis baissé la tête tout aussi machinalement. Ces âmes tristes ne correspondaient pas aux descriptions que les romans américains en font. Leur mélancolique banalité était trop nuancée, trop indescriptible, pour aspirer à l’immortalité.
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