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Citation de Marech20


Depuis neuf mois, mes mains n’avaient plus caressé le corps d’une femme. J’ai caressé la peau douce et blanche de mon cahier, et mon stylo s’est mis en marche.
J’ai écrit sans presque relever la tête, en ne regardant que ma main. Pendant des jours, j’ai écrit une histoire qui n’avait rien à voir avec ce que je venais de vivre, et cependant tout y était, les soirs d’été, la tiédeur des murs, la respiration des forêts, la peur, la lumière des saisons sur les toitures brûlées du monastère, le besoin d’aimer, la solitude, la neige, l’amitié, le visage des morts, l’or des jours qui s’éteint doucement…
Ma main dessinait le mystère et la force de chaque mot. Solex se couchait contre mon cahier et s’endormait en gardant ma main remuer imperceptiblement.
Un jour, on se met à écrire, pour entendre la voix lointaine de nos mères. Lorsque j’écris, j’entends la voix de la mienne. Elle me lisait le soir, devant le poêle à charbon de notre cuisine, des livres qui me faisaient rêver, pleurer, découvrir le monde…Je n’entends sa voix que lorsque j’écris, dans le silence de la page blanche. Les mots que je trace lentement m’enveloppent de sa tendresse, de son regard profond, de la douceur de sa petite veste de coton rouge, contre laquelle je m’endormais. Je n’ai jamais été aussi paisible et confiant qu’en écoutant la voix de ma mère. Je suis devenu écrivain pour l’entendre chaque jour. Elle vit dans tous les cahiers que j’ai ouverts. Elle marche sur chaque ligne, comme je la regardais venir dans les rues de Marseille, se pencher vers moi, m’inonder de son rire, de sa jeunesse. Elle est là, aussi tiède et proche que ce chat qui me regarde, ronronne et s’endort. Dans nos cahiers, nous ne cherchons que l’amour. Ma main droite avance lentement, à la recherche de l’amour. Il n’y a que des mots d’amour, les autres n’existent pas. Je vais chercher au fond de moi, toutes les routes que j’ai parcourues, celles qui m’attendent. Les visages que j’ai aimés, les autres ont disparu dans la brume de ma mémoire.
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