Et tandis qu’il déposait son joint à demi consumé dans l’une des encoches du cendrier, son intérêt se porta sur les entrelacs compliqués de la fumée bleutée. Il remarqua que peu à peu, cependant qu’elles s’éloignaient de leur point d’origine, les élégantes volutes se muaient en efflorescences fantasmagoriques. Aucun ouvrage de botanique n’en recelait d’aussi somptueuses. Ensuite, sous l’effet des imperceptibles mouvements de l’air sans doute, elles prenaient insensiblement l’apparence de majestueuses ailes diaphanes naviguant par paires. Celles-ci, assurément, ne pouvaient appartenir qu’à des oiseaux paradisiaques. De ces créatures pures et immaculées, d’allure si parfaite que pour un peu, l’on les croirait apparentées aux anges. Ils prenaient à présent leur essor avec une telle grâce que Louis demeurait pétrifié dans son fauteuil, submergé par l’émotion.
("Des oiseaux plein le cendrier", Stephan Ferry)