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Citation de fanfan50


La situation politique du Soudan avait plongé le pays dans un marasme économique qui avait poussé un grand nombre d'hommes, les plus robustes, sur les chemins rocailleux de l'émigration. Mais même les plus forts devenaient, hors de chez eux, des hommes vulnérables, des animaux battus au regard mort, les yeux pleins d'étoiles éteintes. Loin de leur maison, ils redevenaient tous des enfants apeurés que rien ne pouvait consoler si ce n'est le succès de l'entreprise.
Avoir le coeur qui frappe fort dans la poitrine, avait résumé Wiraj en se frappant le thorax. Et un bruit puissant avait résonné jusque dans l'armoire d'Ajatashatru. Avoir le coeur qui frappe fort dans la poitrine chaque fois que le camion ralentit, chaque fois qu'il s'arrête. La peur d'être découvert par la police, recroquevillé derrière un carton, assis le cul dans la poussière au milieu de dizaines de caisses de légumes. L'humiliation. Car même les clandestins avaient leur honneur. Dépossédés de leurs biens, la seule chose qu'il leur restait, d'ailleurs. L'honneur. Pour que jamais on ne les voie ainsi. Pour qu'on se les rappelle grands et forts. Toujours.
Et puis ce n'était pas la peur des coups qui tordait les entrailles, non, car sur cette rive-là de la Méditerranée, on ne frappait pas, c'était la peur d'être renvoyé dans le pays d'où l'on venait, ou pire encore, dans un pays que l'on ne connaissait pas, parce que les Blancs s'en foutaient pas mal vers où ils vous balançaient, l'important pour eux étant de ne plus vous avoir chez eux. Un Noir, ça fait vite désordre. Et ce rejet était plus douloureux que les coups de bâton qui ne détruisent en somme que les corps et non les âmes. C'était une cicatrice invisible qui ne disparaissait jamais et avec laquelle il fallait apprendre à vivre, à revivre, à survivre.
Car leur volonté était inébranlable.
Tous les moyens étaient bons pour rejoindre un jour les "beaux pays". Même si en Europe on ne désirait pas partager le gâteau avec eux.
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