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Citation de Pays_des_contes


- Tu crois qu’un jour on découvrira notre existence ?
Elle m’a posé la question très doucement. (On ne sait jamais, il y a toujours des oreilles qui trainent. A peine nos parents nous entendent-ils poser une question qu’ils se précipitent dessus, comme un chat sur un rat, avant de la déchiqueter jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien pour nous, rien auquel nous ayons même envie de penser.)
- Aucune idée, j’ai répondu en m’asseyant à côté d’elle. Qu’est-ce que tu voulais dire exactement ? Simplement nous, ici, ou tous les Juifs ?
- Nous, ici, dans l’Annexe. C’est trop déprimant de penser à tout ce qui doit se passer ailleurs.
Je n’avais jamais compris que chuchoter pouvait créer une telle intimité.
- Ca ne va pas durer éternellement. Faut espérer.
- Tu ne penses pas ?
(…) J’ai jeté un œil sur son cahier, mais elle l’a tout de suite refermé. « Ah, ça doit être son journal ! » Et naturellement j’ai ajouté :
- Quelquefois, je regarde un objet que j’ai fabriqué de mes mains et je me demande s’il sera toujours là quand j’aurai disparu.
- C’est différent, a-t-elle murmuré.
- Différent de quoi ?
- Des mots, des histoires, des idées.
Nos têtes se frôlaient. Doucement, j’ai passé la main sur son journal. Elle n’a pas bougé.
- Mais ça, c’est un objet que tu as fabriqué, non ? Ces mots, ils seront toujours là, tu ne crois pas, même si on… on n’est plus là, nous ?
Elle me dévorait des yeux et cela me faisait du bien. Comme si j’avais réussi à la surprendre.
- Ils brûlent des livres, a-t-elle ajouté tout bas. Par piles entières. Des tonnes de bouquins.
- Je sais, Anne, mais ton père a raison, ils ne pourront jamais brûler les idées. En tout cas pas toutes.
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