Thierno Diallo

A ma naissance, j'étais le bébé aimé de quelqu'un, et mon arrivée a été un moment de joie. En France, on m'a appelé mineur isolé étranger. Et cela m'effraye. Je suis venu de loin pour fuir la tempête. J'ai erré des mois avant d'arriver chez vous. Je ne sais pas « pourquoi chez vous », bien que vous me le demandiez sans cesse. Souvent j'ai l'impression que vous ne voulez pas de moi ici. Ne soyez pas outrés. Je suis juste un être humain qui cherche un refuge. J'ai envie de goûter à ce qu'on appelle la paix. Donnez-moi un peu de la vôtre, ne serait-ce qu'un instant. Je voudrais être des vôtres, mais je me heurte à tant de barrages. Ne soyez pas réticents à mon égard. Je vous demande juste un peu d'attention, prêtez moi l'oreille , laissez-moi vous dire qui je suis. Vous comprendrez que j'ai une histoire, une famille...
En apprenant à me connaître, vous découvrirez que je ne colle pas à l'image que certains politiciens donnent de moi. Je ne suis pas un semeur de troubles. Des troubles, j'en ai assez connus dans ma vie. C'est d'ailleurs pourquoi je suis parti sans même dire au revoir à Maman. J'entends de la bouche de vos enfants, au collège, ce que vous pensez de moi. Je ne vous en veux pas, vous parlez sans savoir. Vos enfants, eux, me connaissent. Demandez-leur, ils vous confirmeront que je ne suis pas méchant. Je n'ai jamais volé leur goûter, car chez moi j'ai appris la dignité. J'espère qu'un jour vous m'accepterez parmi vous. J'espère que je serai d'ici autant que de là-bas, car je suis encore nostalgique de la Guinée et de mon quartier poussiéreux à Conakry. Ici, j'ai rencontré des gens qui m'ont pris sous leur aile et qui m'ont redonné goût à la vie. Je les remercie et je ferai en sorte qu'ils ne le regrettent jamais.