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Citation de enkidu_


...d’où l’émergence d’une autre question : dans la conception de la Divine Comédie, Dante a-t-il été conscient de puiser à certains ouvrages de la mystique islamique qui lui sont apparentés ? Le genre du poème épique qui décrit sous une forme symbolique la voie que suit celui qui fait l’expérience de Dieu n’est pas rare dans le monde islamique. On peut supposer que plusieurs de ces textes ont été traduits dans la langue provençale(1), et l’on sait que la communauté des "Fedeli d’Amore", à laquelle appartenait Dante, était en relation avec l’Ordre des Templiers(2), établi en Orient et ouvert au monde spirituel de l’Islam.

On peut même aller plus loin et trouver presque pour chaque motif majeur de la Divine Comédie un modèle correspondant dans les écrits ésotériques islamiques, pour l’interprétation des sphères planétaires comme les degrés de la connaissance spirituelle, pour la subdivision de l’enfer en cercles, pour la figure et le rôle de Béatrice et bien d’autres motifs. Mais par ailleurs, d’après certains passages de l'Enfer (chant XXVIII, 22), il est en fait peu probable qu’il ait connu et reconnu l’Islam comme religion. Il est en revanche vraisemblable qu’il a pu puiser dans des écrits qui n’étaient pas eux-mêmes islamiques, mais indirectement influencés par des modèles islamiques(3) ; néanmoins, tout ce qui est parvenu par cette voie jusqu’à Dante aura sans doute été plus modeste et limité que ce que laissent supposer les études comparatives(3). Car les vérités spirituelles sont ce qu’elles sont, et les esprits peuvent très bien se rencontrer à un certain niveau de connaissance, sans avoir jamais rien su de leur existence mutuelle sur le plan terrestre.

(1) II existe une traduction en provençal médiéval du Mi'râj, le récit de l’ascension du prophète (Eschiele Mahomet, publié par Munoz Sendino et Enrico Cerulli) ; mais il s’agit là d’une version plutôt populaire de ce thème, qui a par ailleurs donné lieu à d’importants traités métaphysiques et mystiques.

(2) Voir les travaux de Luigi Valu, en particulier II Linguaggio segreto di Dante e dei Fedeli d’Amore, Optima, Rome 1928.

(3) A cet égard, il faut citer tout particulièrement le manuscrit Ms. Latin 3236 A (Bibliothèque Nationale, Paris), publié pour la première fois en 1940 par M.T. d’Alverny dans Archives d’histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age, que nous avons mentionné dans notre ouvrage sur l’alchimie. Il offre un certain nombre d’affinités avec la Divine Comédie, fait étrange, d’autant plus qu’il mentionne expressément les fondateurs des trois religions monothéistes, Moïse, le Christ et Mahomet, comme les véritables maîtres de la voie cognitive vers Dieu.

(4) Voir les études du P. M. Asm Palacios. [Notamment L’Escatologia musulmana en la Divina Comedia, Madrid 1919 et 1942. Édition française de prochaine publication, chez Archè], (pp. 154-155)
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