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Citation de enkidu_


Le 21 au matin, « une salve de coups de canon proclama que Delhi dépendait de nouveau de la couronne britannique ». Mais la cité reconquise par les Britanniques – l’ancienne capitale de l’Hindoustan, la prestigieuse métropole moghole – n’était plus qu’une ville morte, seulement peuplée de pillards anglais pris de boisson. Le commandant William Ireland, qui ne s’était pas privé de critiquer pendant l’assaut la brutalité de ses propres collègues, fut horrifié par le spectacle qu’offrait la ville « libérée » :

« La dévastation de cette illustre cité en disait long sur les horreurs de la guerre, écrit-il. Hormis les abords immédiats des demeures où étaient cantonnés nos soldats, tout était silencieux et désert. Il n’y avait plus de marchands assis dans les bazars ; plus de caravanes de chameaux ni de chars à bœufs franchissant les portes de la ville ; plus de passants dans les rues ; plus d’hommes en grande conversation sur le pas de leur porte ; plus d’enfants jouant dans la poussière ; plus de voix de femmes derrière les écrans de bois sculpté. Des meubles de toutes sortes encombraient la chaussée.

Ce spectacle était rendu encore plus poignant par les traces que les habitants avaient laissées derrière eux. La cendre noircissait l’âtre des cheminées et les animaux domestiques erraient à la recherche de leurs défunts maîtres. Ça et là des maisons avaient été incendiées ou ravagées par des boules de canon, des éclats d’obus jonchaient le sol, et de temps à autre on tombait sur des cadavres décomposés, à moitié dévorés par les corbeaux et les chacals. Les marchands étaient restés jusqu’au bout dans leurs échoppes : seuls le pilonnage de la ville et les rumeurs des atrocités commises par nos soldats les en avaient chassés. »

Le lieutenant Ommaney du corps des Guides, qui avait étudié l’ourdou, le persan, et l’histoire de Delhi, fut lui aussi effaré par ce qu’il découvrit au lever du jour :

« Toute la ville est dépeuplée, nota-t-il. Ne passent dans les rues que de rares groupes d’une soixantaine d’hommes et de femmes, qui se rendent vers l’une des portes pour s’enfuir ; les cipayes et les habitants sont invisibles. On ne voit que nos soldats occupés à piller les maisons, c’est tout. Les cent cinquante mille habitants sont presque tous partis. Même lors de la conquête de Delhi par Nadir Shah, il n’en fut pas ainsi. » (pp. 480-481)
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