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Citation de enkidu_


Entre l’islam et la tradition occidentale, grecque ou chrétienne, il existe une différence radicale d’orientation. Il suffit d’entrer, à Istanbul, successivement dans Sainte-Sophie et la Suleymanié, qui en a pourtant repris le modèle architectural, pour que cette différence s’impose immédiatement avec évidence : dans le premier cas, il s’agit d’une descente de l’esprit dans le monde matériel, dans l’autre d’une métamorphose du matériel en spirituel.

Les églises ont presque toujours un plan symbolique, en croix, qui est un mandala du corps humain. Lieux de la messe, c’est-à-dire de la cérémonie symbolique de la Passion du Christ, elles sont très souvent fondées directement sur des tombeaux de saints : l’autel même, qui est la table de sacrifice, symbolise le tombeau du Christ, d’où l’esprit fait retour à l’immatériel, mais le moment de présence matérielle reste un moment essentiel. Par les vitraux colorés des cathédrales gothiques, la lumière céleste, en traversant les images de l’histoire sainte qui l’ont révélée au monde, pénètre, pour le sanctifier, dans le monde matériel : l’église constitue une présence du ciel dans un lieu terrestre.

La mosquée – d’où toute référence au matériel et a fortiori à la présence d’un corps mort est bannie, et où il n’existe aucune cérémonie symbolique sacrée mais seulement le croyant en prière se tenant en présence d’un Dieu spirituel transcendent – produit le détachement d’un lieu terrestre à la terre et sa projection mentale dans un ailleurs sans figure et autre, absolument. Dans la cour des grandes mosquées d’Ispahan, un grand bassin reflète la coupole du ciel, mais aussi les murs qui, perdant ainsi leur matérialité, rencontrent l’image du ciel dans l’eau : il ne s’agit pas de présence matérielle et réelle, comme dans la messe, mais du miroir et du reflet d’une lumière renvoyant à la transcendance, et c’est à partir de cette différence qu’il faut comprendre ce qui distingue l’image peinte en Occident de l’image dans la miniature persane. (pp. 47-48)
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