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Citation de gill


gill
03 février 2014
Quelles nouvelles en Bretagne ? Que de bruit ! Que de fumée !
Le cheval du roi, quoique boiteux, vient d'être ferré de neuf :
Il va porter en Basse Bretagne le papier timbré et les scellés
Le roi de France a six capitaines, bons gentilshommes, gens de grande noblesse ;
Le roi de France a six capitaines pour monter sa haquenée.
Deux sont en selle, deux sur le cou, les deux autres sur le bout de la croupe.
Légère armée qu'a le roi de France !
Dans notre balance elle ne pèsera pas cent livres !
Le premier porte le pavillon et la fleur de lys du poltron ;
Le second tient une épée rouillée qui ne fera grand mal à personne ;
Le troisième a des éperons de paille pour égratigner la sale bête ;
Le quatrième porte deux plumes, l'une sur son chapeau de capitaine et l'autre derrière l'oreille.
Avec le cinquième viennent les herbes de malheur : le papier timbré, la bourse vide,
La bourse du roi, profonde comme la mer, comme l'enfer toujours béante !
Enfin, le dernier tient la queue et conduit le cheval en poste.
Quel équipage a le roi ! Quelle noblesse ! Quelle armée !
Or, à leur première arrivée, avec leur timbre en ce pays,
Ils étaient vêtus de haillons et maigres comme des feuilles sèches ;
Nez longs, grands yeux, joues pâles et décharnées ;
Leurs jambes étaient des bâtons de barrières et leurs genoux des noeuds de fagots ;
Mais il ne furent pas longtemps au pays qu'ils ne changèrent nos six messieurs ;
Habits de velours à passementeries, bas de soie et brodés encore !
Nos six croquants s'étaient même acheté chacun une épée à garde d'ivoire.
En bien peu de temps, dans nos cantons, ils avaient changé de manière d'être.
Face arrondie, trogne avinée, petits yeux vifs et égrillards,
Ventres larges comme des tonneaux, voilà le portrait de nos six huissiers :
Pour les transporter jusqu'à Rennes, on creva six chevaux de Limon !
Lors de leur arrivée première, avec leur timbre, en ce pays,
Jean le paysan vivait aux champs tout doucement, bien tranquille, à l'aise.
Avant qu'ils s'en retournassent chez eux, il y avait eu du trouble dans nos quartiers ;
Il en avait coûté de nos bourses de faire requinquer nos gaillards !
Mes amis, si ce n'est pas faux ce que racontent les vieillards,
Du temps de la duchesse Anne, on ne nous traitait pas ainsi !
("la ronde du papier timbré" recueillie dans le Trégor par Mr de Penguern peu avant 1850 - des travaux récents, allant à l'encontre d'une opinion généralement admise, semblent bien prouver qu'il ne s'agit pas, pour l'essentiel, d'un faux - le texte qui précède en est la traduction extraite, page 189, de "les révoltes bretonnes", volume paru aux "Éditions Sociales" en 1975)
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