Le désir et la satisfaction sont étroitement liés. J'ai pu l'observer souvent chez les enfants : lorsqu'ils pleurent, gémissent, tapent des pieds pour obtenir quelque chose, cette chose perd aussitôt de sa valeur dès que les parents cèdent. Nos sages connaissaient bien ce caprice de la nature humaine. Ne disaient-ils pas : "Mayim genuvim yimtaku", c'est-à-dire "les eaux détournées ont un goût plus agréable". Sauf que, dans mon cas, il y avait des poissons dans l'eau. Je fais allusion à l'époque où Surie, ma fille de dix ans, désirait... mourait d'envie... en fait, avait désespérément "besoin" d'un poisson rouge. [...] Pour parvenir à ses fins, Surie avait un obstacle de taille à franchir : moi. Instinctivement, elle mit en pratique son grand pouvoir de persuasion.
Petite, j´avais l'habitude de rêver au lit, imaginant ma vie future. Je serais une maman avec une centaine d'enfants, tous magnifiques, doués, intelligents, toujours propres et bien élevés. Dans cette existence faite sur mesure, je pourrais m'accorder tout ce que je désirais. Mon enfance se passa ainsi à rêvasser, parce que les rêves étaient tout ce que mes parents pouvaient m'offrir. D'origine hongroise, ils avaient survécu à l'holocauste nazi et avaient dû lutter durant des années, de pays en pays, pour pouvoir enfin s´établir et nous donner l'essentiel.