Une feuille de hêtre !
De ma fuite d'entre les hommes
Avais-je escompté
La libération sans borne et sans rivage,
La révélation magique, le miracle ?
Peut-être.
Mais je n'ai rapporté
Que cette feuille d'arbre,
Cette petite feuille à peine dentelée.
Est-ce là ce miracle
Qui m'aurait commandé de marcher jusqu'au soir
Et qui m'aurait permis de rentrer chez les hommes ?
J'avais imaginé peut-être
Des horizons prodigieux,
La découverte de secrets
Cachés encore à tous les yeux,
Des renaissances de visages,
La majesté des choses vierges
Jamais nommées, jamais connues.
Je ne me souviens plus. Peut-être.
Mais je rapporte en témoignage
La petite feuille de hêtre.
Nous ne devons pas oublier, écrivait Clara Zetkin en 1923, que le fascisme est le mouvement des éléments sociaux déçus et privés de moyens d’existence.
Infirmes,
Avec sur vos poitrines des rubans et des croix,
Vous êtes des héros, aujourd’hui.
Infirmes,
Avec sur vos poitrines vos rubans et vos croix,
Demain, chez vos patrons,
Vous serez des ouvriers plus malhabiles,
Plus mal payés,
Vos petits auront faim.
Et si demain, même demain,
Nous vous disons
Que votre sang vous l’avez versé
Pour que vos maîtres soient plus durement vos maîtres,
Vous lèverez contre nous vos moignons,
Vos béquilles de gloire et de douleur,
Infirmes, avec vos rubans et vos croix,
Qui n’accepterez pas d’avoir pour rien souffert.
Ce dont il me souvient
C’est du sombre besoin
Qui me forçait alors à fuir, à fuir au loin,
C’est du besoin de solitude et de retraite
Qui repoussait de moi l’humanité déserte.
Je ne pouvais plus, je ne pouvais plus rester parmi les
hommes.
J’avais donné beaucoup, j’avais tout donné peut-être,
À qui, à qui et pour quoi avais-je donné tant
d’amour ?
Nous traversions de ces sombres jours
Où les hommes épuisés s’abandonnent.
Je ne doutais pas de leurs lendemains et de leurs
réveils,
Mais j’étais épuisé moi-même
Et j’avais gagné mon droit à la solitude,
À quitter les hommes, leur terrible multitude,
À m’écarter d’eux pour pouvoir leur revenir,
Et maintes choses vitales
Moi aussi m’avaient quitté,
La disponibilité
De mon corps et de mon âme
Et l’amour et l’amitié
S’éloignaient de mon passage.
Pour ne rien renier et pour ne pas trahir
Comme il me fallait fuir !
Et c’est alors dans ma retraite
Qui a duré beaucoup d’années,
Que j’ai fait cette découverte,
La découverte d’un témoin
Que jamais je n’avais cherché.
Voyage, grand voyage !
Je ne rapporte rien
Que cette feuille d’arbre,
La petite feuille de hêtre.
Apprendre à obéir c'est se construire un moi idéel conforme aux normes donnés par la société à imiter. (Philippe Geneste)
Le mouvement fasciste est une révolte organisée de la petite bourgeoisie contre les conséquences du capitalisme. (Un allemand, Révolution prolétarienne, août 1923).
L’attitude consistant à promouvoir le renoncement à ses idéaux, communistes ou syndicalistes révolutionnaires, anarchistes ou socialistes, au profit de la mascarade élective bourgeoise, est un glissement vers l'acceptation d'un renforcement des modalités répressives de gouvernement. (Philippe Geneste)
Comme ils ont en poche les clefs des prisons
Et qu’ils font métier de mentir
Ils s’appellent les réalistes.
À vous les gens d’église,
De toutes les églises,
Temples et synagogues,
Trempant vos crucifix,
Vos talmuds et vos bibles
Dans les plaies de vos frères,
Le fascisme ne peut s’établir que sur une préalable abdication volontaire et enthousiaste de l’individu.