Par leur refus irréductible de l'État sous toutes ses formes, les anarchistes russes se mirent eux-mêmes à l'écart des autres groupes de gauche. Ils observaient fidèlement le principe de Bakounine, selon lequel tout gouvernement, quel qu'il soit, est un instrument d'oppression.
Les dirigeants syndicaux, convaincus que le système capitaliste était sur le point de s'écrouler, abandonnèrent les méthodes évolutionnistes, telles que l'établissement de conventions collectives ou la législation du travail, car ce type d'action impliquait la reconnaissance de l'ordre existant.
Ouverts à tous les ouvriers de gauche, sans considérations d'appartenance à un parti, les soviets devaient agir en tant que conseils ouvriers sans parti pris, improvisés “à la base“, au niveau des quartiers et des villes, et ayant pour objectif de renverser l'ancien régime. Cette conception syndicaliste des soviets, organe apolitique et sans idéologie de la classe ouvrière, était considérée par les sociaux-démocrates comme une véritable hérésie.
La plupart des anarchistes russes manifestaient le plus profond mépris pour les systèmes rationnels et pour les intellectuels qui les avaient construits.