Quand j'étais enfant, dans les années 1950-1960, je marchais beaucoup et, curieusement, les distances me paraissaient moins longues. [...]
La marche est le rythme normal de mon appétit de « voir ». Quand on marche on parle peu, mais on voit bien. [...] Marcher en montagne occupe la tête, permet de faire le vide en contemplant le bout de ses pieds ; d'apprivoiser le temps et le relief sans compter. La distance, la durée, le dénivelé sont des éléments de ceux d'en bas. La montagne n'a que faire des chiffres.
Photographier au rythme de la marche permet d'aller très loin à la rencontre de ceux d'en haut. Et ceux d'en haut sont à l'image de leur montagne : visages tout en relief, à la fois rayonnants et fermés, sculptés, ravinés, soumis à l'alternance brutale des saisons. Les regarder vivre, c'est un privilège ; ils nous apportent beaucoup...
Cette ferme a été détruite non pas qu'elle n'était plus belle, mais elle ne plaisait plus ou bien elle manquait de confort, ou bien elle était trop vétuste ou bien que sais-je encore. Toujours est-il qu'elle a été remplacée par un somptueux chalet avec de grandes baies vitrées, un parking, des terrains de jeux, des caves, des rangements, enfin tout ce qui rend les gens heureux.
Ce qui me rend le plus nostalgique, c'est que dans quelques années tout le monde aura oublié que dans ce virage, au Planellet,il y avait une ferme deux fois centenaire et on n'imagine pas les milliers de souvenirs qui sont partis avec elle... A. C. (p. 43)
Un jour je suis allé au musée. Ils parlaient des tavaillons et des ancelles, ils expliquaient que les ancelles étaient plus courtes que les tavaillons, une fois qu'ils eurent fini de parler, je leur ai dit : « Ecoutez, vous vous trompez, c'est exactement le contraire, ce sont les tavaillons qui sont plus courts, on les cloue, les ancelles on ne les cloue pas, pour les faire tenir on les charge de lauzes (pierre plates), elles font 60 centimètres de long, je le sais bien, j'ai une partie du toit qui a été recouvert en tôle en 40, mais avant c'était des ancelles, je sais de quoi je parle. » R. C. (p. 54)