Je n'étais pas à ma place chez les irlandais, même si du sang irlandais coulait dans mes veines, "parce que, eux, ils détestent les ratons".
Et je n'étais pas bienvenu chez les "ratons" non plus, parce qu'ils me prenaient pour un irlandais.
Quant aux Blacks, de toute façon, ils détestaient les blancs. Pas tous, mais ils étaient quand même nombreux à vouloir me battre à mort.
Ma tête était sur le point d'éclater.
Est-ce que j'avais une vie de famille heureuse? J'ai répondu "ouais", en pensant que ça nr regardait personne.
Est-ce que mes parents me frappaient? "Sûrement pas", ai-je affirmé, même si ça leur arrivait de temps en temps.
Est-ce que j'étais fier de mon origine cubaine? "ça vous pouvez me croire." En fait, cela ne m'avait jamais traversé l'esprit.
Elle éclata de rire.
- Les Noirs bien convenables et collet monté, comme mon père - il est médecin - , aiment que je sois élégante, comme les filles blacks devraient être selon eux. Il faut fréquenter de bons établissements, avoir de bonnes manières, un bon vocabulaire, tout ça. Mais avec les "frères" militants, c'est une autre histoire. J'ai beau cultiver le look black, porter des cuissardes, une mini-jupe en lamé argent comme Tina Turner, et me coiffer avec une énorme afro, dès que j'ouvre la bouche, pour eux, je suis une Oréo.
- Une quoi ?
- Comme les biscuits Oréo : noire dehors et blanche à l'intérieur. Aucun groupe ne m'accepte. Ni les Noirs ni les Blancs.
Je n'arrivais pas à y croire. Exactement comme moi !
Car le mal veut détruire le bien avant qu'il ne puisse s'épanouir !