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Critique de jvermeer


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« Mon incompréhension du monde actuel s'accroît sans répit ainsi que mes doutes à nous voir parvenir à réprimer les flots de ces penchants criminels, intégristes, vénaux, irrespectueux ou simplement stupides qui le polluent au quotidien. Cependant, je demeure combative car je peux désormais d'un revers de plume expulser ma révolte, faire levier de mes mots afin de libérer la pression sur mon coeur. »

Voilà ce qu'écrit en guise de présentation de son recueil, Marlène Martinvalet dont le nom de plume est Marl'Aime.
J'ai pensé au poète Stéphane Mallarmé en lisant. Comme celle de Mallarmé, la poésie de Marl'Aime est moderne, brillante, technique, intelligente. Elle aime nous faire découvrir des mots rares, pour la rime, le coup de coeur, mais aussi pour leur musicalité, leur esthétique.
Certains poèmes m'ont été énigmatiques, leur langage résistant à la raison de ceux que je lis habituellement. Toutefois, j'ai senti dans ces quatrains et autres sonnets somptueusement écrits, une vibration dans les phrases, un gros travail de recherche dans la syntaxe et les mots qui m'ont laissé admiratif.

J'ai beaucoup aimé en début de recueil un poème consacré à son papa mort jeune alors qu'elle était une petite fille :
« Rien ne sert de maudire à grands flots cette année
Qui me priva si jeune, éclipse instantanée,
Du géniteur soleil par lequel je suis née
Peu me chaut de savoir en fait lequel appât
De mes filets d'amour hier la mort happa
Afin de t'éloigner, tu vis en moi, Papa. »

Les lecteurs vont se faire une idée dans quelques extraits de poèmes du talent si particulier de l'auteure. Elle nous fait partager ses élans d'espoir et de révolte : « le temps que dure ici notre humain ministère /Chacun de nous met mal ou bien sur sa balance /Des droits que lui prescrit son propre baptistère (chapelle) /Mais il en recevra du ciel l'équivalence ! ».

Les maux de ce monde sont son combat : intolérance, violence, bassesse, victimes innocentes, injustice, misère. Sa plume se veut un remède au désespoir qui pourrait l'atteindre :
« Mon dieu je t'en supplie allège ma tristesse,
Devant ces miséreux lentement je me meurs,
Car cette déchéance étouffe mes humeurs,
Donne-moi le pouvoir d'écrire avec justesse ! »

La politique la révolte : « La droite ou la gauche on cesse d'y croire, /Pleine est la coupe à cortex cérébral, /De cette Chienlit d'ordre électoral /A coup de serments d'éden illusoire. »

Comment ne pas adhérer à une pensée exprimée avec cette force poétique ? : « Mais la plus belle chose à laquelle je tiens, /Pouvant réconcilier musulmans et chrétiens, /Jeunes et plus âgés, ou même d'avantage, /La chose qui m'émeut en doux pleurs triomphants, / Sans hésitation, c'est d'en faire partage, /Et de voir se transmettre un savoir aux enfants. »

En humaniste, elle s'interroge sur l'avenir de l'homme :
« Sortirons-nous grandis en combattant nos failles !
Celles qui font le nid où s'éveillent les maux
Lors ma muse surgit pour m'insuffler les mots…
Sortirons-nous grandis en combattant nos failles ? »

À la fin du recueil, j'ai eu une dernière pensée pour Stéphane Mallarmé. Il disait que le poète doit « Tout reprendre à la musique », « Peindre non la chose, mais l'effet qu'elle produit », et « Laisser l'initiative aux mots ». Il avançait qu'il ne fallait pas nécessairement vouloir comprendre la poésie, au sens de son intelligibilité, mais l'éprouver comme une véritable jouissance simplement sensible, musicale et plastique. Une anecdote se rapporte à son ami le peintre Edgar Degas qui se plaignait devant lui de ne pas réussir à écrire des poèmes alors que, disait-il, il avait « beaucoup d'idées ». Mallarmé lui aurait répondu : « Mais mon cher Degas, ce n'est pas avec des idées que l'on fait les poèmes, c'est avec des mots ».
Le style et la recherche poétiques de Marl'Aime m'ont paru proche de ce poète du 19e.

Venu récemment en poésie, je ne peux que me fier à mes sensations. C'est la première fois que je lis une poésie aussi originale, jonglant avec les mots, parfois hermétique, intellectuelle jusqu'au bout des ongles. L'auteure nous livre ses sentiments, les met à nu sans chercher à plaire.

« du sonnet au lai mon coeur est ivre,
Et pour l'art d'un haïku
Leste au Kaizen ma muse se livre,
Il me reste moins de temps à vivre
Que je n'ai vécu. »

Kaizen : processus d'amélioration continue

Merci Marl'Aime

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Lien : http://www.httpsilartetaitco..
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