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Critique de cecilestmartin


Un roman fort, qui se lit sans reprendre son souffle. Paul, le narrateur, écrivain, cherche à échapper à la Maladie qui le hante depuis toujours et qui a fini par épuiser Sarah, sa compagne depuis 20 ans. Séparés, ils continuent de vivre non loin de l'autre, dans une station balnéaire bretonne, afin qu'il puisse profiter de Manon et Clément, ses enfants dont l'absence au quotidien génère une véritable souffrance.
Sa mère étant hospitalisée, Paul est sollicité par son frère pour prendre soin de leur père. L'écrivain fuit sa famille et la banlieue dans laquelle il a grandi, s'astreignant à une ou deux visites annuelles.
C'est ce retour que l'auteur nous invite à vivre. Paul va retrouver ses anciens copains, le plus souvent restés sur place, vivotant de petits emplois, souvent dans une grande précarité, ayant eu le plus grand mal à s'extraire de leur milieu social. C'est une chronique sur la crise, sur l'exclusion, sur la reproduction sociale, sur la fin des banlieues rouges aussi comme dirait F. Dubet car la tentation du vote FN guette tout ce petit monde qui ne voit plus d'issue à son sentiment d'abandon. Olivier Adam laisse la parole à ces quadragénaires qui regrettent de ne pas avoir davantage investi leur scolarité, tout en laissant filtrer le sentiment que, de toute façon, tout était déjà joué … C'est sombre, sans lueur, sans complaisance non plus. L'auteur-narrateur, comme souvent, porte un regard très pessimiste sur la société, regard nourri des théories de Bourdieu qu'il illustre assez bien ici.
Les lisières, c'est aussi le poids de l'histoire familiale, les secrets qui tuent en silence, le sentiment de ne pas avoir été aimé, regardé et entendu, un père dur et impatient, une mère usée par le travail et la routine, la peur de ne pas pouvoir payer les trente années de traite du pavillon. Paul se sent toujours en lisières, jamais totalement dedans, avec personne même pas avec ceux qu'il aime profondément, et il cherche les raisons de ce mal-être, à cette maladie qu'il a crû prendre de vitesse en partant en Bretagne mais qui toujours est là, qui guette et ne renonce pas.
Le style d'Olivier Adam contribue pour beaucoup à ce qu'on se sente happé dans un tourbillon, saoulé de mots, de phrases qui peuvent débuter en haut d'une page et s'achever à la suivante. A la fois introspectif et exploratif, le discours de l'auteur-narrateur me touche profondément, il pose des questions à la fois sociales – auxquelles je suis très sensible – mais aussi existentielles dans lesquelles chacun, me semble-t-il (ou moi, au moins !), peut trouver écho de ses propres angoisses ou quête de sens.
C'est sensible, intelligent – même si pas toujours très nuancé – très bien écrit, parfois plein d'humour (j'ai adoré la tirade sur les bobos), pour moi un très bon roman !

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