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Critique de michfred


Soirée arrosée et violente où George et Martha s'invectivent, s'humilient, se torturent mutuellement, sous les yeux effarés d'un jeune couple d'invités.

Chacun à leur manière : brutale, grossière , frontale pour Martha, sournoise, soumise, insidieuse pour George.

On sent que le scénario de leur querelle est une musique bien rodée, qu'elle obéit à un rituel convenu de mise à mort.

Ils convoquent le papa-gâteau de Martha, directeur de l'université brillant, si proche de sa fille, si supérieur à ce gendre informe et sans ambition qui se traîne encore, vingt ans après son diplôme, dans le département d'Histoire. Ils convoquent aussi des crimes imaginaires, des fantasmes cruels qui les divisent et les dévorent...

Depuis le temps qu'ils vivent ensemble et partagent une sorte d'amour-haine inassouvi et inextinguible, il n'y a presque plus de surprises. Juste des menaces délicieusement inquiétantes, quelques limites à ne pas franchir - et c'est si excitant alors de le faire, l'alcool aidant!

Alors quand ce théâtre intime a la chance d'avoir des spectateurs, leur rituel malsain et aviné devient divertissement de choix. Une vraie "nuit de Walpurgis"! C'est bien connu, plus le public réagit, meilleure est la performance. D'autant que le jeune couple pris en otage, Nick et Honey, n'est pas si naïf que cela: Nick est un opportuniste sans scrupule, un arriviste aux dents longues, et même Honey, derrière ses airs de cruche, est une spécialiste de la grossesse- nerveuse -pour- attraper- le- mari et semble déjà avoir un sacré penchant pour le brandy!!

La mise en scène d'Alain Françon est parfaite: un décor simplissime - vrai "trou à rats" comme le dit Martha en première réplique -tout un programme!- : moquette pourrie et élimée, escalier vieillot qui monte vers les lieux- refuges - toilettes pour vomir, chambre pour gémir-, un pan de mur à forte charge alcoolisée derrière lequel se trouve le bar, invisible, un divan avachi où on a du mal à s'asseoir, on on s'échoue, plutôt, comme une baleine épuisée... La porte enfin, par laquelle on entre pour se faire dévorer et qui vous recrache, en charpie..

C'est tout.

Je redoutais un jeu hystérique - style Taylor- Burton- mais la direction d'acteurs est impeccable : la torture est distillée avec subtilité- une sorte d'humour vachard et tonique même, côté Martha- puis lentement, le jeu dérape et on touche au nerf : derrière le barnum de la scène de ménage, derrière la cuite monumentale, derrière la méchanceté féroce, il y a une vraie souffrance.... et même quelque chose qui ressemble encore un peu à de l'amour…

Dominique Valadié est époustouflante en Martha et Wladimir Yordanov très juste en George qui réserve ses coups …

On sort quand même un peu essorés par tant de violence verbale et un peu groggy d'avoir vu ingurgiter autant d'alcool..
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