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Critique de Melisende


Vous le savez sans doute (ou pas), ces derniers temps, j'ai du mal avec la littérature young adult, comprenez la littérature destinée aux adolescents et jeunes adultes. Pourquoi ? Parce que, généralement, les auteurs prennent les lecteurs pour des imbéciles en leur promettant un univers imaginaire qui tient finalement en deux lignes et qui n'est qu'un prétexte à une histoire d'amour souvent niaise et sans intérêt.
J'avais donc un peu peur, en ouvrant Une guitare pour deux, de trouver ces défauts qui m'exaspèrent… et contre toute attente, j'ai été plutôt positivement emballée par cette petite histoire sans prétention qui, ancrée dans notre monde moderne, offre de jolis moments d'émotions. Ce n'est pas un coup de coeur ou même un livre que je conseillerais absolument, mais un titre qui a sa place sur la chaise longue de l'adolescent qui sommeille en vous.

Le titre annonce la couleur : Mary Amato va nous parler d'une guitare et plus généralement de musique puisque c'est ce qui va permettre à deux adolescents a priori « incompatibles » de devenir amis.
D'un côté Lyla, la jeune prodige du violoncelle, adulée par ses camarades de classe, bonne élève et jolie, polie et bien élevée, parfaite en tout point. Outre sa présence dans la fanfare de l'école en tant que « premier violoncelle », elle est destinée à passer les auditions pour entrer dans un grand conservatoire classique… de l'autre Tripp, jeune solitaire un brin rebelle, dédaigné par les autres lycéens, incompris par sa mère qui lui confisque sa guitare car il n'obtient pas de bonnes notes et qui préfère jouer dans son coin, pour lui seul.
Deux adolescents que tout semble opposer et qui pourtant, se découvrent bien plus de points communs qu'ils n'auraient pu le croire au premier abord… L'opposition peut sembler un peu manichéenne entre la jeune fille parfaite, musicienne classique ouverte au monde mais suivant à la lettre chacune de ses partitions et le jeune rebelle, guitariste plus rock'n'roll, très solitaire et préférant jouer « au feeling ». Vous aurez compris l'idée, si l'un fait blanc, l'autre fait noir. Et si l'un a réservé le studio de musique les jours pairs, l'autre s'y rend les jours impairs. Rien ne laissait présager qu'une belle amitié se nouerait entre eux… relation lancée par un petit mot de protestation de Lyla qui ne supporte pas les déchets de Tripp. Les échanges se multiplient, toujours par petits mots interposés laissés dans leur local commun. Et si, dans les premières pages, la discussion reste futilement basée sur les règles de vie du lycée, les messages se font de plus en plus approfondis et de vraies problématiques voient le jour.

Lyla et Tripp découvrent chacun que l'autre ne vit qu'avec un seul parent et que celui-ci semble un peu trop protecteur et est évidemment, complètement à côté de la plaque. Entre une maman qui confisque la guitare de son fils pour que celui-ci se penche un peu plus sérieusement sur ses études et un papa qui pousse sa fille à réaliser des rêves qu'il croit être les siens… Leurs échanges vont permettre à ces deux jeunes de mettre le doigt sur ce qui cloche dans leur vie et à amorcer un pas vers une solution : Tripp, à l'aide de Lyla, va se rendre compte que la vie est plus belle lorsqu'on s'ouvre aux autres et la jeune fille va comprendre, grâce à son nouvel ami, qu'elle ne vit pas la vie qu'elle désire mais celle qu'ont construit son père et sa « meilleure » amie pour elle car elle n'est jamais libre de ses choix. Leur entente mutuelle et le changement de leur existence est symbolisé par cette guitare qu'ils se partagent tous les deux : Tripp va sortir de sa réserve et aller vers un autre être humain en tentant d'apprendre l'instrument à Lyla, celle-ci va sortir de sa perfection et découvrir ce qu'elle veut vraiment en abandonnant son violoncelle au profit de l'instrument plus « rock'n'roll » (même si un violoncelle peut être sacrément rock aussi… cf. le groupe Apocalyptica !).

C'est donc un petit « cliché » et sans réelle surprise narrative, mais c'est plutôt bien amené, assez tendre et plutôt frais. J'ai par contre été étonnée (dans le bon sens), par le chemin que prend la relation qu'entretiennent Lyla et Tripp. Il est de notoriété publique que, dans un livre young adult, la romance (et généralement l'indispensable triangle amoureux) a une place de choix… j'avais donc peur d'une énième amourette adolescente un peu niaise… mais pas du tout ! Dans Une Guitare pour deux, ce n'est « qu'une » histoire d'amitié et c'est tant mieux ! A cet âge-là on vit des émotions fortes, les amitiés sont d'autant plus intenses et signifient vraiment quelque chose dans la vie d'un adolescent ; je trouve que cet aspect est bien retranscrit dans ce petit roman.

Mary Amato place son histoire dans un contexte très moderne et n'hésite pas, de ce fait, à doter la forme de son texte d'éléments « contemporains ». Les adolescents commencent par s'envoyer des petits mots sur papier mais passent ensuite aux sms et aux mails. Je pense que cet aspect plaira aux plus jeunes lecteurs qui se reconnaitront encore plus facilement dans l'histoire de ces deux jeunes héros qui, malgré tout, reste assez atemporelle. Les chapitres sont très courts (ils correspondent parfois aux messages que s'envoient Lyla et Tripp, donc n'excèdent pas une seule page), la lecture est donc rythmée et très rapide. Une Guitare pour deux se dévore en quelques heures seulement.

Mon seul regret concerne un aspect très « formel » qui résulte du fait que j'ai lu des épreuves non corrigées et non le roman-objet dans sa forme définitive. En effet, ce titre possède de nombreuses illustrations éparpillées à l'intérieur du texte, des partitions, pour être précise. Ce qui, je n'en doute pas, doit ajouter un petit cachet à l'ensemble. Malheureusement, n'ayant pas le « vrai » roman entre les mains au moment de ma lecture, je n'ai pu profiter d'aucune des images prévues, n'ayant à la place, que des indications telles que « Illustration n°1 ». C'est vraiment dommage car je pense que j'ai loupé un petit truc et que ma lecture aurait été plus immersive si j'avais eu tous les éléments en main pour en profiter pleinement.

Malgré ce petit détail et le côté assez « cliché » du texte, je ne doute pas qu'il plaira énormément à de jeunes lecteurs et je le conseillerais même à ce public. En young adult, j'ai l'impression qu'il vaut mieux rester dans notre monde contemporain et aborder des thèmes d'actualité plutôt que de tenter de créer un univers imaginaire qui ne sert à rien. Merci à Mary Amato de ne pas avoir fait d'extravagances, et de l'avoir bien fait, tout en simplicité et en émotions.
Lien : http://bazardelalitterature...
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