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Critique de laulautte


L'éveil des Chimères est un roman qui pourrait être qualifié de monstrueux mélange d'un recueil de nouvelles à la Jaworski et d'un livre-univers à la Damasio… une chimère en somme ce premier roman d'Éric Amon...
Un roman de fantasy donc, d'inspiration médiévale, dont les héros ne sont autres que des grandes figures de la mythologie grecque ; « une constellation de trajectoire », pour reprendre les termes de l'auteur, qui révèlerait la clé d'une énigme et le tracé d'un labyrinthe.

« Au commencement était l'Enigme, dit le Sphinx. ». « Au commencement était le Labyrinthe, dit le Minotaure. ».
Chaque nouvelle est l'éveil d'une chimère. Dans un récit à la première personne, elle se dévoile, se livre, se nomme et se révèle, en fin, sous les redoutables traits de crayons de Laurent Libessart dans des illustrations superbes.
Dans ce labyrinthe d'histoires qui n'ont aucun lien apparent, s'alternent des brèves d'une page, le fil d'Ariane : la quête de l'une de ces Chimères, comme des pierres semées pour récolter son chemin et résoudre l'énigme de l'intrigue ; s'entremêle enfin la pierre angulaire, trois chapitres d'une autre quête, celle d'une autre identité pour résoudre l'énigme du thème en filigrane.
Le long des méandres de chacune de ces créatures fabuleuses se dévoile leur univers au travers des indices disséminés qui compensent aisément la judicieuse absence de carte (un attrait supplémentaire au caractère énigmatique). Car tout aussi juste que soit le coup de crayon de Laurent Libessart dans les représentations des Chimères, ou encore celui de Jean-Sébastien Rossabach, qui signe une splendide couverture, ces enchanteresses Contrées sauvages et inhospitalières, saupoudrées d'onirisme, ces immémoriales forêts, ces déserts cendreux, ou encore le coeur de ces montagnes aux crêtes neigeuses sillonnées de ruisseaux cristallins, n'auraient pu se révéler avec autant de beauté.

L'éveil des chimères est un « tableau vivant » où se « joue et se déjoue la symphonie des sens », où « on peut assister à des scènes enchanteresses sans qu'il soit réellement question de magie ».
Éric Amon nous dévoile et nous plonge dans un univers sombre, horrifique et désespéré, un véritable éveil des sens avec une plume tour à tour visuelle au travers du regard de Méduse, sonore par la voix de Sphinx et les murmures du violon de la mystérieuse Cendres, goûteuse et savoureuse, aussi, par la gueule de Manticore, très charnelle et sensuelle dans les bras du silène Silence…, une plume sensuelle et sensorielle donc, empreinte de poésie savamment dosée de métaphores synesthétiques. Une plume ensorcelante d'autant plus immersive que l'auteur maîtrise avec brio le changement de ton et de champ lexical de la nature du personnage et de son environnement.

« Au commencement étaient les Monstres, dit l'Anthrope, et puis nous sommes venus.
Au commencement était la Paix, disent les Chimères, et puis les Anthropes sont venus. »
Inéluctablement se pose la question : « Qu'est-ce qui fait le monstre, au fond ? Les cornes, les plumes, les écailles, ou bien la manière d'agir ? », une question à la réponse sans équivoque posée sur un ton loin d'être sentencieux.
Un monstre quelle que soit sa nature est un monstre. Après tout, Anthropes et Chimères ne sont-ils pas le fruit (à une nuance près) de l'évolution d'hybridations successives…

Ce serait lui prêter beaucoup de prétentieux de croire, qu'à lui seul l'Anthrope, peut se rendre responsable de l'éradication de cette espèce fabuleuse… nous sommes dans un roman après tout… qui laisse entrevoir la perspective d'un autre, Éric Amon semble faire les rêves turbulents nécessaires ; le talent pour également, preuve en est ce premier roman abouti.
Une invitation à rêver de retrouver toutes ces personnifications fortes et attachantes, Sphinx : Maître des Enigmes, l'oniromancien, l'herméneute, ou encore Manticore : l'Esprit de la Forêt..., et ces personnages formidables : la mystérieuse Cendres et sa Confrérie des Effraies (aux allures de Peter pan et les enfants perdus version Loisel), Méduse, bien entendu, la seule de la Horde (la 3ème et non la 34ème) à avoir vu et à pouvoir témoigner…, Gnosse levant une armée de Minotaures, Hydre sortie de sa caverneuse torpeur, et pourquoi pas la Guilde des Conteurs… dans un oneshot de fantasy dans la pure tradition tolkienienne.

Merci à Leha Editions pour leur bon idée de participation à Masse Critique et pour leur travail d'excellente qualité (format idéal, papier de qualité, mise en page soignée, couverture sublime, vraiment le top du top). Merci pour cette incroyable découverte… qui va en amener d'autres dans leurs mondes imaginaires.
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