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Critique de domi_troizarsouilles


L'un des meilleurs cosy mystery que j'aie jamais lu !
Ce roman baigne dans cette légèreté propre au genre, ancrée dans le quotidien de personnages savoureux, tout en proposant une vraie enquête qui tient le lecteur en haleine et le pousse à essayer de trouver le meurtrier à travers les différents indices qui sont semés l'air de rien.
Mais surtout, l'autrice nous convie à un immense buffet sans fin, où tous les plats paraissent plus appétissants les uns que les autres ; si une partie des recettes sont rassemblées en fin de volume, leur préparation et quelques trucs ici ou là émaillent ce livre, tandis que les petits plats et autres gâteaux délient les langues, ouvrent les coeurs, et font saliver le lecteur de bout en bout ! Et on ne s'en lasse pas un seul instant, on a vraiment envie de partager tous ces repas plus ou moins importants, on a envie de rencontrer quelqu'un de la trempe de Tannie Maria, qui résoudrait nos problèmes grâce à une recette tout à coup tellement appropriée !

Et, last but not least, comme le précédent roman sud-africain que j'ai lu tout récemment, cette histoire est profondément ancrée dans la réalité de ce pays. D'une part, le récit est émaillé de mots ou expressions, quelquefois une petite phrase, en afrikaans. Bien entendu, un lexique en fin de volume (après les recettes icon_wink ) traduit et/ou explique ces mots et expressions. Mais il y en a vraiment beaucoup, je dirais plusieurs à chaque page… et je ne sais pas jusqu'à quel point ça peut être énervant (ou pas) pour un lecteur francophone lambda – je sais que, pour moi, devoir recourir trop souvent à un lexique en fin de volume est souvent rédhibitoire.
Mais ici, ça s'est révélé juste… extraordinaire, ça participait à la magie de ce livre ! pour la simple raison que je n'ai dû consulter ce lexique que pour un mot sur trois (en moyenne, à la grosse louche), ou bien par souci de vérification, mais dans de très nombreux cas c'était tout simplement limpide. En effet, rappelez-vous : je fais partie de cette génération de Belges qui a dû apprendre le néerlandais, et en prime j'ai une maman flamande (même si j'ai grandi et ai donc été éduquée dans un environnement où on parlait français, en Wallonie) – et, au risque de me répéter aussi : le flamand est le néerlandais De Belgique, exactement la même langue à l'écrit, même si ça peut sembler différent à l'oral, le néerlandais des Pays-Bas étant beaucoup plus guttural et avec des tonalités parfois proches de l'anglais. Mais je digresse… Ainsi, je l'avais déjà remarqué lors d'une expérience d'un « camp international » il y a plus de 25 ans, camp où j'avais rencontré de jeunes Sud-Africains : l'afrikaans, issu du néerlandais donc, est resté extrêmement proche de la langue originale, malgré ses autres influences plus exotiques.
Et voilà que, dans le présent livre, même si l'afrikaans écrit s'est quelque peu écarté de l'original européen, il me suffisait de lire ces mots et expressions à haute voix avec mon meilleur accent flamand icon_wink et le sens devenait évident ! A ma propre surprise, j'ai adoré ce côté exotico-flamand (si l'on peut dire), qui avait pour moi un petit goût de retour aux sources : maman ne m'a jamais appris le flamand, à l'époque ça ne se faisait pas ; il n'en reste pas moins qu'elle parlait de temps en temps flamand, avec sa famille, avec une voisine d'origine flamande également, avec le gamin d'un voisin à qui elle donnait des cours de rattrapage (et que je suivais en catimini) ; d'une façon ou d'une autre, je baignais dedans ! Et, de façon plus intime encore, les enfants (quel que soient leur âge) de couples multilingues le savent : une maman prononce les mots doux et tendres dans sa langue maternelle, car ce sont ceux-là qui lui viennent spontanément quand elle s'adresse à son jeune enfant ou, paradoxalement, c'est aussi cette langue-là qui ressortait spontanément quand maman s'énervait tout à coup contre papa icon_wink ou découvrait que nous avions fait une bêtise… avant de penser à se fâcher en français ! icon_wink Doux souvenirs d'enfance, car certaines expressions sont quasi-pareilles… je ne pouvais qu'apprécier !

Par ailleurs, comme dans ma lecture précédente, les aspects sociétaux ou politiques de ce pays jouent également un rôle – bien moins important, ici on n'est pas dans une enquête politique, et l'apartheid semble déjà loin : l'une des deux collègues de Tannie Maria est noire, son copain qui travaille dans la police aussi, et tout cela est normal et ne semble plus poser le moindre problème, et on s'en réjouit ! Et pour être juste : on croise aussi l'un ou l'autre personnage à qui cette mixité plaît beaucoup moins… mais le ton reste résolument optimiste. Pour ne citer qu'un exemple : ils n'apportent rien à l'histoire en tant que telle, mais deux chapitres entiers sont consacrés à la mort de Nelson Mandela – certes, ça a pour but, sans doute, de replacer l'histoire dans son contexte temporel… mais il y avait 1.000 autres moyens pour ce faire, mais c'est ce personnage inoubliable qui est choisi, et même sur plusieurs pages ! Et bien entendu, ces quelques pages sont extrêmement touchantes.

On parlera aussi de la problématique des femmes battues en Afrique du Sud. On comprend très vite (ce n'est même pas un spoil car c'est dit dans le synopsis) que Tannie Maria a connu un époux violent, contre qui elle n'a jamais vraiment pu se battre (au sens noble du terme) mais dont la mort l'a libérée. le livre ne s'apitoie pas sur cette vie gâchée de Tannie Maria (tant qu'elle vivait dans l'ombre de ce mari), mais révèle l'air de rien qu'un nombre impressionnant de femmes sont battues par leur mari en Afrique du Sud, indépendamment de tout critère de race ou de religion ; l'un des plus hauts taux au monde ! Dès lors, elle ne pouvait que réagir quand elle rencontre une autre femme battue… et c'est l'occasion de proposer des pistes de solution, pour toute femme sud-africaine qui lirait ce livre ? et pour justifier bien habilement l'implication de Maria dans l'enquête.

Eh oui, comme je le soulignais d'emblée, il y a aussi une vraie enquête, menée par de vrais policiers, avec « l'aide » au début très intrusive de Tannie Maria et ses deux collègues journalistes. Cependant, au lieu de courir après le meurtrier avec une arme policière ou un appareil photo de paparazzi en herbe, Maria mène toute son enquête avec gâteaux et bons petits plats, sans jamais perdre de vue son objectif. J'ai eu la bête idée de lire certains commentaires qui regrettaient que cette enquête aurait été très simple… pour ma part, je l'ai trouvé bien menée et pleine de rebondissements, non dénués d'un certain humour en plus. Certes, on est bien loin d'un policier façon thriller haletant ; ici on est dans un quotidien a priori tranquille… ou pas, du pur cosy mystery, avec des scènes vraiment sympas, d'autres plus tendues mais jamais au point de réellement inquiéter le lecteur, on n'est jamais dans ce registre-là ! Et ainsi, on suit notre apprentie enquêtrice pas à pas, avec elle on traverse ces paysages d'une petite ville d'Afrique du Sud et de son veld avoisinant, où il n'est pas rare de croiser coyotes, kudus ou autres troupeaux de zèbres. Ajoutons à cela un petit côté romance tout en douceur, subtil et qui paraît tellement réaliste et surtout très humain, et on est tout à fait conquis.
A découvrir absolument !
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