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Critique de piccolanina


Une photo a suffi à Brahim pour éveiller les démons qui le dominent inconsciemment depuis des années , avec ce mot accolé à son esprit : " Négro " .
Brusquement deux fenêtres se sont ouvertes dans sa mémoire ; l'une fuligineuse , centrée sur le sourire narquois d'un gamin , marocain comme lui , qui rabâche des paroles pleines de fiel : " negro ! négro ! négro ! " , et puis l'autre lumineuse , où apparaît une vieille dame , à la peau noire , qui lui sourit de sa bouche de miel .

Tout son être se pétrifie à ce retour dans le pays de son enfance , face à un Mokhtar , avilissant , et la douce et énigmatique , Yemma Yahout !
Même ses yeux le lâchent , s'embuent et perçoivent à peine cet objet qui traîne sur un coin du meuble , depuis la nuit des temps . Une soucoupe ! Une minuscule soucoupe qu'il a trimbalée toute une vie de déménagement en déménagement .

Il regarde enfin ce bout de vaisselle qui a sûrement intrigué sa belle , sa femme , morte , partie vers l'au-delà suivant la volonté d' Allah !
Mais lui , maintenant il est seul , retraité , vieux , et , il ressasse et ressasse toute la journée .
Il tombe malade , cauchemarde ; ses rêves s'emplissent d'esclaves , enlevés à leur famille ; Yemma Yahout en est la pièce maîtresse ; la soucoupe y tient une place aussi.
Dans sa tête enfiévrée , Brahim veut exorciser les pensées racistes et funestes qui le hantent depuis sa jeunesse .

A peine guéri , il décide de retourner dans son village questionner sa tante , encore vivante , à propos de cet accessoire étrange et surtout comprendre sa rage et sa haine des basanés , des noirs !

A travers cet homme solitaire qui va retrouver ses racines , la réponse à ses pourquoi et ses comment , l'auteur nous ouvre son coeur et son esprit à l'autre , le différent .
Il exècre le racisme et pleure l'esclavagisme qui , pourtant n'est pas l'apanage d'un seul pays comme le Maroc . Aujourd'hui encore , rien ne change ; ces deux sinistres mots sont toujours à l'avant-plan de la scène internationale !

" Cette histoire d'esclavage rend compte de ce que nous étions et de ce que nous sommes certainement encore .
Quand je pense à ces immigrés africains qui arrivent à Tanger dans l'espoir de vivre sous des cieux plus cléments , à la façon dont ils sont reçus et traités , je ne suis pas loin de croire que ces actes d'exclusion rappellent d'un peu loin la cruauté et la barbarie dont ont fait preuve nos ancêtres et qui continuent à agir en nous . "

Les idées défendues par l'auteur sont nobles , sages , vertueuses et vraies ; elles dirigent son roman dans un style clair , coloré et poétique .
Comme tout amoureux de l'océan , ses mots se perdent parfois dans le bleu de ses eaux avec une nostalgie ineffable .

Cependant , ce récit pourrait s'apparenter à un conte où un génie chevaucherait Pégase car quand " Tout le monde , il est beau , tout le monde , il est gentil " , cela devient légèrement trop parfait .
Tout va trop vite dans l'évolution des sentiments de chaque protagoniste , dans la découverte de ses pourquoi et comment , dans sa chance qui devient de plus en plus grande , même au point de vue héritage .

Je n'ai pas eu le temps de laisser mes pieds s'enfoncer dans le sable mouillé en regardant l'océan qui venait m'éclabousser .

Un senior peut-il vraiment changer sa personnalité qu'il s'est créée durant toute une vie ou celle-ci va , plutôt , se confirmer de plus en plus sans s'accorder quelque modification ?

Je remercie sincèrement Cécile et le Service de Presse de ce roman , joli cadeau rempli des saveurs du Maroc et de candeur de l'auteur .
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