AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Shaynning


Sixième lecture de la fratrie Court toujours, collectif de petits romans pour ados, je sors de celui-ci gentiment amoché, c,est le moins qu'on puisse dire! C'est de loin mon préféré de la série, mais c'est aussi un des plus poignants.

"Silent boy' est le pseudonyme d'un adolescent de 16 ans, Anton, qui navigue sur un forum en mode "sous-marin", c,est-à-dire en simple observateur et lecteur. Un pseudo qui le définit bien: il ne prend la parole ni dans le monde réel ni dans le virtuel, bien à l'abri de sa carapace étanche. Pourtant, Anton en a des choses à dire. Il se console en observant ces ados qui se livrent de manière constructives sur le net en songeant avec cynisme que sa classe n'atteindra jamais ce niveau de considération. de fait, c,est une classe clivés entre les invisibles et les show-off populaires, chacun bien ancré dans son stéréotype et marinant tous ensemble dans un climat aussi toxique qu'invivable. Les profs tentent alors une approche en leur faisant un exercice de réflexion, où on nomme les inconvénients et avantages d'être homme ou femme. Anton en aurait bien a dire des inconvénient d'être un homme, mais c'est la colonne des femmes qui se remplie dans cette catégorie, comme si être un homme ne venait qu'avec des avantages. Entre temps, Anton a un nouveau coloc de chambre, Nathan, qui en raison de son look, passe pour un homosexuel. Lorsqu'Anton fini par lui demandé la raison de son changement de chambre, Nathan explique qu'en réalité, ce n'est pas lui qui fut exclu, mais bien lui qui a demander le transfert, parce que l'homophobe notoire qui lui servait de coloc est en réalité homosexuel lui-même et qu'il le harcelait pour des faveurs. Enfin, sur le forum, Anton remarque une des personnes, qui sort du lot et qui lui semble avoir une tête sur les épaules. Donc, entre son coloc, sa classe, ses amis et cette inconnue, Anton commence à se dire que le statu quo pèse lourd, mais prendre la parole lui semble la chose la plus ardue à faire...et pourtant. Un évènement majeur pourrait bien le faire changer d'avis.



Voir ENFIN un ado de ce genre me redonne presque foi envers les auteurs pour ado, parce que pour une fois, je suis tombé sur un ado qui est capable d'une vraie introspection, d'une grande sensibilité et qui a réussi à voir à travers ses propres erreurs pour mieux cheminer. C'était vraiment beau à lire.


On a peu d'occasion de voir des gars de cet âge se livrer de cette façon et on oublie aisément que la lutte féministe inclut de laisser une place à nos ados hors des stéréotypes et archétypes qui les rend prisonniers eux aussi des plus désuètes facettes du patriarcat. Apparence, sensibilité, exploration sexuelle, coquetterie, communication, on parle de pleins de choses ici en ce qui concerne les ados gars. Anton n'est d'ailleurs pas le seul à nous livrer une réalité basé sur les apparences et la loi de la majorité, il y a aussi le personnage de Nathan.


Le court passage où Nathan explique qu'il est en réalité l'hétéro maniéré harcelé par un homo refoulé qui se prend pou un mâle alpha a été un moment aussi inconfortable que révélateur. Tout simplement parce que ces deux archétypes sont hyper rares et pourtant, il en existe bel et bien. C'est un exemple type du manque de variété des figures masculines dans la littérature jeunesse, qui est congestionnée d'archétypes désuets comme le wanna-be bad boy-je-porte-du-cuir-je-suis-un-incomprit, le sportif attardé, le "nerds" maigre qui s'habille en pépère, l'autre bad boy qui est supposé cacher un prince charmant, le ténébreux asocial, l'autre bad boy qui est un être de je ne sais quel espèce fantastique, etc. Des personnages comme Nathan et Anton ne sont pas légion et pourtant, bon sang que je nous souhaite d'en avoir plus! Parce que pour une fois, on a des gars qui ne se comporte pas comme des salaud en se justifiant d'un passé difficile comme les Edward, Quatre, Hardin et autres bidules du genre.


J'ai beaucoup aimé le cheminement émotif et introspectif d'Anton et plus il nous en livrait sur lui, plus je le trouvais magnifique ce personnage. Il veut que le monde tourne plus rond, il cherche à changer les choses, même s'il est clairement pas outillé pour ça. Et il pose un réel acte de changement simplement en verbalisant le fond de sa pensée. Ça prend des couilles pour faire ça - ça il l'ignore c'est clair - mais en posant cette simple action, il nous démontre qu'il va vraiment de l'avant. le roman se termine ensuite, mais cette ouverture appelle à un changement dans la façon d'être du personnage et ça me plait beaucoup. Je vous le dit, des comme lui, on en veut plus!


Aussi, mention au personnage féminin, Clara, qui a une bonne tête sur les épaules et qui a choisi Nathan au lieu de l'armée de duch bag de sa classe, bravo Clara!


Cependant, je m'interroge une fois de plus sur l'intensité du sexisme ambiant dans les écoles de France, parce que ce degré n'est pas le même ici, au Québec. du moins, pas de cette ampleur ni avec une si grande violence ( évidemment je me base sur mon expérience). Cette rigidité de pensée quasi cristallisée semble dénoté un fossé majeur entre les genres et je me demande s'il est avéré dans la vie. Simple réflexion, ça ne change rien au fait que j'adore ce roman!


Le roman alterne entre le récit au "je" et les conversations sur le forum, et ça se lit facilement en une fois, sacré suspense pour un roman qui n'est pas un polar. C'est un climat tendu et l'auteur le rend très bien à travers les yeux d'Anton. Et j'aime la fin, vraiment, c'est porteur d'espoir tout en demeurant sobre. On oublie que le sensationnel n'a pas besoin d'être présent quand il s'agit de récit de ce genre, porté par les enjeux sociaux et les émotions. La sobriété sied mieux.


Petite note à l'intention des lecteurs qui ne sont pas français, il y a présence de mots soit d'argot soit de "langage de jeune" comme "Davon", "s'est latté", "tchiper", "aller au self", "des wesh de premier pro", "faire tourner les nudes" ou binger" ( D'ailleurs, à mes amis de France, si vous êtes d'humeur traductrice, allez-y gaiement!).


À voir!

Classé Secondaire deuxième cycle, 15 ans +, mais il n'y a pas de scènes sexuellement explicite ni de scènes violentes.

Comme tous les romans de la collection Court Toujours, vous avez à son achat la version papier, audio et numérique.
Commenter  J’apprécie          513



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}