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Critique de PrettyYoungCat


Blues pour l'homme blanc est une pièce de théâtre où James Baldwin excelle à nous mener à une réflexion subtile sur la question raciale aux États-Unis.

Son histoire s'appuie pour cela sur le tragique fait divers intervenu en 1955 : le meurtre de Emmett Till. Il est devenu pour toujours, pour tous les Afro-Américains, un symbole à l'instar de George Floyd bien des années plus tard. Il était un jeune-homme de 14 ans venu du Nord, en visite dans sa famille dans le Sud. le Sud où le racisme ne se cache pas sous de faux-semblants, mais un racisme assumé où les lynchages sont pratique courante. Ainsi donc, ce jeune adolescent, un brin crâneur, un brin arrogant, s'est vanté auprès de ses amis de fréquenter des Blanches par chez lui. Et ainsi a-t-il été pris au défi d'en draguer une là, au Mississippi. N'ayant pas conscience de son audace ou plutôt du péril qu'il encourait, le jeune Emmett s'est montré familier avec une commerçante blanche avec un "salut chérie" ou quelque chose du genre. Et ainsi, mari et beau-frère s'en sont-ils pris à lui, massacrant le gamin au point que c'est par un détail que sa propre mère a pu l'identifier. Son visage était lui devenu trop méconnaissable. Malgré sa douleur, sa mère a tenu à ce que le monde entier voit ce que le racisme avait fait à son fils et son cercueil est resté ouvert lors de ses funérailles. Pour que le martyre de son fils serve à la cause de tous les Noirs. Et le procès qui a jugé les deux meurtriers blancs les a acquittés...

Avec l'intelligence qui caractérise l'écriture de James Baldwin, il donne à voir dans cette pièce les multiples visages du racisme et de la responsabilité collective de pareil drame.

Il sort de tout manichéisme. le racisme est blanc et noir.
Le Blanc est parfois un "nègre blanc" (le Blanc qui soutient la cause des Noirs ou entretient des rapports amicaux avec eux).
Le Noir est parfois un "Oncle Tom" (un Noir vu comme étant à la botte des Blancs).
Le Blanc s'empare des femmes noires comme de friandises mais accuse l'homme noir d'être une sorte de bête sexuelle dangereuse pour les femmes blanches.
La justice est une parodie où le procureur (blanc va sans dire), censé défendre les parties civiles, enfonce la victime. Car la victime est noire, donc coupable.
Un racisme du Nord qui ne dit pas son nom, se cache sous une pseudo tolérance et qui vous fait croire à une liberté qui n'existe pas pour vous si vous êtes Noir.
La résignation ou la colère qui se mue en haine féroce des Noirs vis-à-vis des Blancs, attisant un feu qui couve déjà.

Cette pièce est prégnante aujourd'hui encore, à la lumière de l'actualité.
Il y a eu beaucoup de Emmett Till.
Il y a eu beaucoup de George Floyd.
Beaucoup trop.

Et le message de James Baldwin s'adresse à tous : Blancs comme Noirs.
Il faut redessiner les lignes du pouvoir pour que les lois Jim Crow ne se cachent plus derrière les inégalités socio-économiques, voire sous l'uniforme d'un officier de police ou la robe d'un juge.
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